Soixante-dix pour cent de la pornographie téléchargée à partir d'Internet est visionnée ou copiée sur les heures de travail, entre 9h et 17h. Et dans 30% des cas, l'opération est effectuée par une femme.

Soixante-dix pour cent de la pornographie téléchargée à partir d'Internet est visionnée ou copiée sur les heures de travail, entre 9h et 17h. Et dans 30% des cas, l'opération est effectuée par une femme.

«Dans presque toutes les entreprises qu'on visite, on trouve du matériel pornographique dans un ordinateur sur trois. Surtout lorsque les gens travaillent dans des bureaux fermés et que le système d'exploitation ne bloque rien», précise l'enquêteur privé Claude Sarrazin.

Quant aux adeptes féminines, qui existent par centaines, elles ne visitent pas toujours ces sites pour en rire ni par simple curiosité, dit-il: «Certaines conservent du matériel assez hard.»

L'ancien policier parle en connaissance de cause: depuis quelques années, sa compagnie, Sirco, a scruté les ordinateurs de plusieurs dizaines d'entreprises soucieuses de lutter contre le crime informatique. Aujourd'hui, à l'occasion du congrès annuel du Barreau du Québec, il prodiguera ses conseils à l'hôtel Reine-Élizabeth de Montréal.

«La porno au bureau, c'est l'équivalent des anciens calendriers de garage pleins de femmes nues, estime l'enquêteur. Mais puisque Internet permet d'être plus discret, les images prolifèrent maintenant dans les bureaux de cadres et de professionnels. Et elles sont beaucoup plus envahissantes, vu leur nombre et leur nature.»

Récemment, un haut dirigeant a été congédié après le passage de Sirco. «Même s'il gagnait plus de 150 000 $ par année, il téléchargeait six heures de vidéo porno par jour, révèle M. Sarrazin. C'était ridicule d'imaginer que personne ne s'en rendrait compte. Mais ce n'est pas un cas isolé.»

D'après son expérience, les sites pornographiques remportent la palme, et de loin, parmi tous les sites nuisant à la productivité des employés. Suivent les sites de voyage, le site e-Bay (pour acheter en ligne), MSN (chat), les sites de rencontres et les blagues et vidéos divertissants. Une grande entreprise de Montréal, où 2000 employés travaillent jour et nuit, a ainsi constaté qu'Internet lui «volait» son personnel 80 000 heures par année.

«En général, on analyse ce qui se fait sur l'ensemble du réseau. Mais si l'entreprise s'est dotée de règles, on peut cibler les gens et il peut y avoir des sanctions», souligne M. Sarrazin.

Crimes graves

Certains amateurs de pornographie brouillent les pistes en volant le mot de passe de leurs collègues et en profitant de l'heure du midi pour naviguer à leur nom, dit-il. Mais ils finissent eux aussi par être identifiés.

Dans la plupart des cas, les crimes informatiques sont autrement plus difficiles à détecter, indique toutefois M. Sarrazin. «Internet, c'est le far west. Les gens et les entreprises ignorent encore à quel point ils sont vulnérables. Les techniques et les outils technologiques se raffinent de façon impressionnante. Mais la police nous aide du bout des doigts, puisqu'il s'agit d'enquêtes complexes, longues et coûteuses.»

Aujourd'hui, les criminels peuvent jouer à cache-cache en achetant une adresse Internet introuvable. Ou profiter du sans-fil pour pirater à distance le réseau d'une entreprise. «Il est même possible de voir tout ce qui se passe dans une maison en se branchant sur la webcam du voisin!» affirme l'enquêteur.

Les employés sabotent parfois leur réseau informatique de l'intérieur. Certains détruisent des informations compromettantes ou injectent des virus. D'autres volent des données pour les vendre à la concurrence, ou pour mieux négocier une convention collective. D'autres, encore, bombardent leurs collègues de messages haineux.

Les techniciens en informatique risquent de détruire la preuve en faisant de fausses manoeuvres, prévient M. Sarrazin. Mais pour les experts, des résultats jadis impensables sont aujourd'hui possibles.

Qu'il s'agisse de ressusciter toutes les images effacées d'une caméra numérique, de récupérer tous les messages textes d'un téléphone cellulaire, ou de faire remonter le temps à un ordinateur reformaté trois fois. Et même, de récupérer 70 % des données contenues sur un disque dur émietté à coups de marteau.