«De 2005, on se rappellera de l'année où le marché de la musique numérisée a vraiment pris forme», souligne le Britannique John Kennedy, président de l'International Federation of the Phonographic Industry (IFPI) rencontré à Cannes plus tôt cette semaine. Le plus puissant lobby de la musique sur Terre représente essentiellement les quatre multinationales qui contrôlent plus de 80% des parts du marché planétaire - Sony-BMG, Universal Music, Warner Music, EMI.

«De 2005, on se rappellera de l'année où le marché de la musique numérisée a vraiment pris forme», souligne le Britannique John Kennedy, président de l'International Federation of the Phonographic Industry (IFPI) rencontré à Cannes plus tôt cette semaine. Le plus puissant lobby de la musique sur Terre représente essentiellement les quatre multinationales qui contrôlent plus de 80% des parts du marché planétaire - Sony-BMG, Universal Music, Warner Music, EMI.

«Le marché mondial de la musique ne renouera probablement pas avec la croissance en 2006», prévoit néanmoins John Kennedy. Plus concrètement, les ventes au détail de CD ou DVD musicaux ont chuté d'environ 2% en 2005, un pourcentage prélevé à partir d'un échantillonage des trois quarts du marché. En 2004, le marché de la musique avait enregistré un chiffre d'affaires mondial de 33,6 milliards de dollars américains.

L'érosion des bénéfices est moins importante qu'elle ne le fut au cours des années précédentes, essentiellement à cause de la réussite de nouveaux modèles d'affaires.

Les revenus de la musique numérique, affirme-t-on à l'IFPI, ont triplé en 2005, pour atteindre 1,1 milliard US. Pas moins de 428 millions de chansons ont été vendues sur Internet en 2005. Le marché des albums a aussi connu une croissance en ligne : aux États-Unis, 16 millions d'albums ont été vendus par Internet, soit deux fois plus qu'en 2004.

«Nous sommes très optimistes pour l'année 2006. Seulement 5% des internautes achètent la musique en ligne, un immense marché reste à conquérir», insiste John Kennedy.

En deux ans, renchérit-il, le marché de la musique numérisée est passé de 0 à 6 % des revenus globaux de l'industrie de la musique. L'IFPI constate, par ailleurs, que les 60% des revenus de la musique en ligne proviennent des téléchargements et 40% de la musique en ligne. Or, cette proportion varie énormément d'un pays à l'autre. Au Japon, en Chine comme au Brésil, par exemple, la téléphonie mobile représente plus 90% des revenus de la musique numérisée, contrairement à des pratiques américaines beaucoup plus rentables. Ce que Kennedy ne dit pas, c'est que la vente de chansons à l'unité s'érodera au profit de modes d'accès illimité (Napster, Yahoo! Music, Rhapsody, etc.) , moyennant un forfait mensuel... moins payant pour la music business. Inutile d'ajouter que le modèle d'affaires par abonnement explose : 2,8 millions d'abonnements en 2005 comparativement à 1,5 million en 2004.

Pour l'instant, révèle en outre John Kennedy, le modèle à la carte représente 52% des revenus de téléchargement (iTunes Music Store en tête de file), le modèle par abonnement représente 8%, les sonneries téléphoniques 32%, les sonneries de rappel 3%. Avec la nouvelle génération de baladeurs numériques et de téléphones portables, la vidéo musicale numérisée amènera prochainement un part non négligeable des revenus de la musique en ligne.

Pour illustrer la diversification des canaux de distribution légale de la musique, John Kennedy cite en exemple la croissance exponentielle de la téléphonie mobile, déjà en train de converger avec les plate-formes de téléchargement. «Apple travaille sur de nouveaux modèles avec Motorola, Napster travaille avec Ericsson, etc.» fait observer l'influent lobbyiste.

«Le terrain légal de la distribution en ligne, ajoute-t-il, ne cesse de s'améliorer. En 2005, une série de jugements ont été remportés par l'industrie contre le piratage musical, dont une décision en juin de la Cour suprême des États-Unis de l'autoriser à intenter une action contre la plate-forme d'échange Grokster pour encouragement aux infractions aux droits d'auteur. Grokster a dû verser 50 millions et a fermé ses portes», martèle le patron de l'IFPI.

Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes de la musique, M. Kennedy ?

Rien n'est moins sûr. Les modèles de téléchargement illimité sont moins rentables que ceux à l'unité, leur prolifération risque de faire baiser le chiffre d'affaires de la musique en ligne. De nouvelles façons de télécharger gratuitement ne cesseront d'émerger. Et la licence globale, une nouvelle disposition du droit d'auteur exonérant les internautes de toute culpabilité moyennant un montant forfaitaire mensuel, ne fera vraiment surface que dans quelques années. C'est-à-dire lorsque les modèles d'affaires auront atteint leur limite et qu'on admettra une fois pour toutes qu'Internet est un univers virtuel impossible à baliser comme c'est le cas dans le monde physique.