La popularité grandissante des téléviseurs à écran plat coûtera un demi-million à la Ville de Montréal, a appris La Presse. Les écocentres ont été submergés de vieux écrans de télévision et d'ordinateur au cours des derniers mois, ce qui a forcé l'administration municipale à embaucher un recycleur pour éliminer ces rebuts très toxiques.

«Ça a été assez radical», dit Laurent Bordelais, directeur de l'exploitation de Provert Sud-Ouest, un organisme qui gère trois écocentres.Cet établissement est bien placé pour témoigner de la vogue de la télévision haute définition: il a littéralement été submergé, dans la dernière année, à mesure que baissait le prix des téléviseurs à écran plat. L'été dernier, entre 20 et 30 citoyens venaient y déposer leurs vieux appareils chaque jour. Par moments, l'entreprise remplissait un conteneur chaque semaine.

«On avait des piles d'écrans, relate M. Bordelais. C'était à la limite d'être dangereux.»

Les écrans cathodiques, comme plusieurs appareils électroniques, regorgent de gaz dangereux. Et leur structure contient du plomb, du cadmium, du mercure, bref, un cocktail de métaux lourds toxiques.

«L'arrivée massive de téléviseurs à écran cathodique dans les écocentres cause un problème environnemental, mais aussi un problème de santé publique important», résume André Porlier, directeur général du Conseil régional de l'environnement de Montréal.

Puisque plusieurs centres de recyclage étaient dans le même pétrin que Provert Sud-Ouest, la Ville de Montréal a embauché la firme Kadisal pour qu'elle récupère les vieux écrans et recycle leur contenu. Le contrat, qui prendra fin à la fin de cette année, coûtera 521 212$ aux contribuables.

Cette dépense n'aurait pourtant pas été nécessaire si le gouvernement provincial avait adopté un règlement pour forcer les fabricants d'appareils électroniques à récupérer leurs produits. Québec a annoncé son intention d'adopter un tel règlement il y a près d'un an, mais le projet se fait toujours attendre.

«Si ce règlement était en place, nos besoins pour engager une firme comme Kadisal seraient beaucoup moindres», explique Alan DeSousa, le responsable du développement durable au comité exécutif de Montréal.

Voilà pourquoi le conseiller presse Québec de légiférer au plus vite.

«On a dit ça haut et fort: il faut que Québec réglemente et le fasse rapidement, affirme-t-il. Il faut élargir la responsabilité des producteurs, et pas seulement les producteurs de matériel informatique.»

La mise en place d'une filière de récupération du matériel informatique a tellement occupé Québec que le gouvernement «a délaissé le cheval de bataille» des téléviseurs. En 2009, plus des trois quarts de ceux-ci prennent encore le chemin de l'enfouissement et de l'incinération, selon Le Soleil.

«Il n'y a pas grand-chose qui se fait», a reconnu au quotidien Mario Laquerre, directeur des programmes et de l'exploitation de Recyc-Québec.

Au bureau de la ministre de l'Environnement, Line Beauchamp, on assure que le règlement sera adopté d'ici à la fin de l'hiver. S'il y a eu des délais, explique l'attaché de presse Dave Leclerc, c'est que le gouvernement ne vise pas que les appareils électroniques. Il entend aussi imposer la récupération d'une série d'autres produits dangereux, notamment les ampoules au mercure, les piles, la peinture et l'huile.

Entre-temps, les écocentres jouissent d'un répit inattendu. Plusieurs d'entre eux s'attendaient à recevoir des centaines de téléviseurs après les Fêtes et les soldes d'après Noël. Mais il semble que les consommateurs aient attendu avant de remplacer leurs vieux appareils.

«On s'attendait à en recevoir encore plus, indique Mathias Blanchard, gérant adjoint de l'écocentre de l'Acadie. Mais avec la crise économique, je pense que les gens sont plus enclins à garder leurs vieux téléviseurs.»

Avec la collaboration d'Éric Moreault, Le Soleil