La justice européenne a infligé lundi un camouflet inattendu au géant américain des logiciels Microsoft , en confirmant sa condamnation pour abus de position dominante ainsi que l'amende astronomique dont il avait écopé.

La justice européenne a infligé lundi un camouflet inattendu au géant américain des logiciels Microsoft , en confirmant sa condamnation pour abus de position dominante ainsi que l'amende astronomique dont il avait écopé.

Le président de la Commission lui-même José Manuel Barroso est monté au créneau pour saluer l'événement, estimant que cet arrêt confirmait «l'objectivité et la crédibilité de la politique de la concurrence de la Commission européenne».

«Cette décision constitue un précédent important pour ce qui est des obligations des entreprises dominantes, en particulier dans le secteur des hautes technologies», a renchéri la commissaire à la Concurrence, Neelie Kroes.

La décision confirmée par le Tribunal de première instance de la Cour européenne de Justice remonte à plus de trois ans. Le 24 mars 2004, la Commission avait condamné l'éditeur de logiciels à une amende record d'un demi-milliard d'euros, la plus forte jamais imposée à une entreprise.

Plus que cette somme astronomique -une bagatelle pour un groupe multimilliardaire tel que Microsoft- l'entreprise américaine contestait les deux mesures correctives imposées par la Commission.

Celle-ci avait alors contraint Microsoft à commercialiser une version de son système d'exploitation Windows, qui équipe 92% des PC de la planète, purgée du logiciel Media Player. Elle estimait en effet qu'en intégrant automatiquement le Media Player à Windows, le groupe se servait de sa position dominante pour éliminer ses concurrents sur le marché des logiciels audio-vidéo.

Bruxelles avait également obligé Microsoft à fournir une meilleure documentation technique à ses concurrents, afin qu'ils puissent concevoir des logiciels compatibles avec la version Windows pour serveurs.

Lundi, le tribunal a rejeté les arguments de Microsoft sur ces deux volets alors que les juristes s'attendaient à un rejet partiel.

Il a néanmoins donné tort à la Commission sur la désignation d'un expert indépendant chargé de contrôler l'application par Microsoft de la décision de mars 2004. Sur ce point, le Tribunal a estimé que «la Commission a agi au-delà de ses pouvoirs».

Si Brad Smith, le numéro trois de Microsoft, est resté comme à son habitude stoïque à l'énoncé du jugement, c'est visiblement secoué qu'il a répondu ensuite aux questions des journalistes.

«Nous allons étudier cette décision soigneusement et si nous devons prendre des mesures supplémentaires pour nous conformer (à la décision de mars 2004), nous le ferons», s'est-il borné à déclarer, préférant attendre une conférence de presse prévue à Bruxelles en début d'après-midi pour réagir en détails.

Du côté des anti-Microsoft, les cris de victoire se multipliaient lundi matin.

«C'est un grand jour pour les entreprises et les consommateurs européens», s'est réjoui Thomas Vinje, l'avocat d'ECIS, une association composée notamment d'IBM et d'Oracle qui dans cette affaire soutenait la Commission.

Pour lui, cette affaire n'est que le début d'une nouvelle ère. Car désormais «le temps est venu pour Microsoft de respecter la loi» et de fournir la documentation technique nécessaire à ses concurrents, documentation que le groupe rechigne à divulguer depuis trois ans.

Cette décision va conforter la Commission, qui depuis plusieurs mois agite la menace de nouvelles amendes pour Microsoft.

En juillet 2006, elle l'avait déjà condamné à payer 280 millions d'euros d'amende supplémentaire pour son retard à fournir les informations techniques nécessaires. Elle pourrait maintenant enfoncer le clou et lui réclamer jusqu'à un milliard supplémentaire!

Quant à la défaite de Microsoft sur le volet Media Player, elle est cruciale car depuis des années, toute sa stratégie est fondée sur l'intégration dans Windows de nouvelles fonctionnalités.