Baladeurs numériques, internet, téléphones mobiles: les nouvelles technologies bouleversent l'industrie musicale, qui aurait bien besoin d'un outil nettement moins sophistiqué, une boule de cristal, pour savoir quel modèle économique la régira à l'avenir.

Baladeurs numériques, internet, téléphones mobiles: les nouvelles technologies bouleversent l'industrie musicale, qui aurait bien besoin d'un outil nettement moins sophistiqué, une boule de cristal, pour savoir quel modèle économique la régira à l'avenir.

Prélude au Midem (Marché international du disque et de l'édition musicale), le Midemnet, consacré aux nouvelles technologies, s'est ouvert samedi à Cannes.

Préoccupation générale et gageure dans ce secteur en constante mutation: tenter de cerner comment fonctionnera le système à l'avenir, alors qu'en 2006, les revenus de la musique numérique dans le monde, bien qu'ils aient doublé (2 milliards de dollars), n'ont toujours pas compensé le déclin des ventes de disques.

Deux des points de vue les plus enrichissants sont venus d'observateurs extérieurs. Lors d'une des conférences en anglais, Jacques Attali a développé une thèse iconoclaste à l'heure où l'industrie fustige les échanges gratuits de musique via les réseaux P2P (d'ordinateur à ordinateur).

Pour l'ancien conseiller de François Mitterrand, aucun retour en arrière n'est possible: la musique est appelée à devenir gratuite.

«Un contenu gratuit ne veut pas dire qu'il n'y a pas de modèle économique: les revenus viendront des concerts, de la publicité, de l'équipement» électronique, a prédit le Français, qui aborde ces questions dans son dernier livre, «Une brève histoire de l'avenir».

Le rédacteur en chef de la revue américaine Wired, Chris Anderson, a défendu sa théorie de la «longue traîne» («long tail»). Selon lui, la dématérialisation de la musique va mettre à bas la notion de top 50. Sans les contraintes liées à la vente physique et grâce à la variété de l'offre disponible en ligne, des morceaux anciens et plus obscurs peuvent devenir aussi rentables que les «tubes» actuels.

«On va basculer d'un système avec peu de morceaux qui se vendent beaucoup à un autre avec des "hits" qui, séparément, se vendront moins, mais seront plus nombreux», a-t-il dit.

Le succès des sites communautaires type MySpace ou YouTube a dicté le mot d'ordre du Midemnet, intitulé cette année «Le pouvoir au consommateur». Au-delà du simple téléchargement de musique sur les plateformes, l'industrie s'intéresse aux modèles du «Web 2.0» qui impliquent davantage le consommateur et le font passer de spectateur à acteur.

L'Américain Brian Camelio a présenté le site ArtistShare, qui fonctionne sur le principe du mécénat. Le public finance la musique d'un artiste qu'il apprécie, musique disponible uniquement sur internet.

«L'artiste de jazz Maria Schneider est ainsi devenue en 2004 la première musicienne à recevoir un Grammy Award pour un album qui n'était pas disponible en magasin», s'est-il félicité.

La radio en ligne Last.fm, créée à Londres, fonctionne sur le modèle communautaire. Les morceaux qu'écoute l'utilisateur sont recensés pour circonscrire ses goûts. Cela permet ensuite de lui conseiller d'autres musiques susceptibles de lui plaire, qu'il peut partager avec d'autres internautes. Last.fm revendique une base de données de 65 millions de titres.

Enfin, Reuben Steiger, responsable de l'agence de communication Millions of Us, a évoqué l'opération de promotion, dans le monde virtuel du site Second Life, d'artistes bien réels, Regina Spektor et Talib Kweli. Une démarche digne de l'écrivain de science-fiction Philip K. Dick mais qui préfigure peut-être l'avenir de l'industrie musicale.