Depuis sa création, Internet évolue à la vitesse grand V. Tant et si bien que les dirigeants ont parfois de la difficulté à suivre. Quelles tendances méritent leur attention? Lesquelles risquent d'affecter leurs façons de faire, d'avoir une influence directe sur leur industrie?

Depuis sa création, Internet évolue à la vitesse grand V. Tant et si bien que les dirigeants ont parfois de la difficulté à suivre. Quelles tendances méritent leur attention? Lesquelles risquent d'affecter leurs façons de faire, d'avoir une influence directe sur leur industrie?

«Avec Internet, n'importe qui peut désormais devenir producteur d'information. Voilà, à mon avis, la véritable lame de fond à surveiller au cours des prochaines années», affirme Pierre Delagrave, président de Cossette Média.

«Les outils qui permettent la création et la mise en ligne de contenus (son, textes, images) sont aujourd'hui à la portée de tout le monde, ajoute le responsable. D'autant plus que sur le Web, ce n'est plus la qualité technique de la production qui assure la popularité d'un contenu, mais l'authenticité du message véhiculé.»

Dans la même veine, le phénomène du «journalisme public» prend de plus en plus d'ampleur. Des sites d'information entièrement rédigés par monsieur et madame Tout-le-monde font leur apparition un peu partout sur la planète.

À titre d'exemple, le site coréen ohmynews.com, qui offre même une version internationale en anglais, propose des articles rédigés par des amateurs. Selon leur popularité, les textes sont achetés à la pièce, ce qui détermine leur rang dans le palmarès et le cachet des rédacteurs.

«Les médias, qui détenaient jusqu'alors le contrôle de l'information, devront partager ce pouvoir avec la population», argue Pierre Delagrave. Cela ne se fera sûrement pas sans impact.

Plus près de nous, YouTube, le leader mondial du partage de vidéos en ligne, gagne constamment en popularité. Selon Wikipédia, ce site enregistre une fréquentation mensuelle de 30,5 millions de visiteurs uniques qui en fait le neuvième plus visité au monde, selon le classement d'Alexa.

Pas étonnant que le 9 octobre dernier, Google en ait fait l'acquisition, pour quelque 1,65 milliard de dollars américains.

«Avec Internet, tout le monde veut être vu et lu, commente Pierre Delagrave. Il est d'ailleurs assez surprenant de constater avec quelle aisance les gens y exposent des aspects très personnels de leur vie. Pour plusieurs experts, ce nouveau phénomène porte déjà un nom: egocasting.»

Consommateurs au pouvoir

Toutefois, le commun des mortels ne s'approprie pas le Web dans le seul but d'y exposer sa vie privée. Par l'entremise des millions de blogues mis à sa disposition, il partage aussi abondamment son expérience à titre de consommateur.

Un phénomène que les dirigeants d'entreprise auraient tout intérêt à surveiller de plus près. «Encore très peu de décideurs connaissent l'existence des blogues et l'impact de ceux-ci sur la société de consommation, déplore Pierre Delagrave. Et encore plus rares sont les entreprises qui s'en servent pour savoir comment leurs produits ou leurs services sont perçus par leurs clients.»

Et pourtant, ces plates-formes pourraient s'avérer d'incroyables sources d'information que les dirigeants devraient exploiter pour non seulement améliorer un produit ou corriger une situation mais aussi pour s'inspirer et recueillir de nouvelles idées.

Notons également que les blogues ne servent pas seulement de tribune pour décrier les expériences négatives: plusieurs consommateurs les utilisent aussi pour valoriser leurs coups de cur. Ce qui, le cas échéant, constitue de la publicité gratuite pour une entreprise.

«Il est normal que les dirigeants ne sachent pas trop quelle attitude adopter en ce moment, car tous les changements en cours sont difficiles à saisir. C'est pourquoi il est important d'expérimenter, d'essayer de comprendre ce qui se passe», suggère Pierre Delagrave. «Pour ce faire, poursuit-il, les gens d'affaires doivent essayer chacune de ces technologies, fréquenter ces nouveaux lieux, et surtout, partager leurs découvertes avec leur entourage.»

Liette D'Amours est directrice des communications au CEFRIO, un centre de recherche-action et de transfert spécialisé en appropriation des technologies de l'information.