La société Hewlett-Packard a versé à des enquêteurs privés plus de 325 000 $US pour espionner ses administrateurs et des journalistes au cours d'une enquête qui pourrait avoir donné lieu à des tactiques illégales et qui a fini par coûter son poste à Patricia Dunn, la présidente du conseil d'administration.

La société Hewlett-Packard a versé à des enquêteurs privés plus de 325 000 $US pour espionner ses administrateurs et des journalistes au cours d'une enquête qui pourrait avoir donné lieu à des tactiques illégales et qui a fini par coûter son poste à Patricia Dunn, la présidente du conseil d'administration.

La surveillance, y compris une opération de «coup monté» et du fouillage de poubelles, a été l'élément le plus coûteux de l'enquête, soit 83 600 $US sur une période de cinq mois, selon une facture présentée à Hewlett-Packard par Security Outsourcing Solutions, et dont la nature a été dévoilée tard lundi par le Comité sur l'énergie et le commerce de la Chambre des représentants des États-Unis.

Mme Dunn a autorisé l'enquête qui a amené les détectives privés à espionner les administrateurs et deux employés de la société, de même que neuf journalistes. Il s'agissait de trouver la source de fuites émanant du conseil d'administration de Hewlett-Packard. À un moment donné, Mme Dunn a songé à utiliser des détecteurs de mensonge, indiquent des documents. La présidente, la directrice des affaires juridiques Ann Baskins, le directeur de l'éthique de l'entreprise ainsi que le chef de la sécurité ont tous démissionné le mois dernier pour leur participation à ce que Mark Hurd, le PDG de Hewlett-Packard, a qualifié d'«enquête indésirable».

«Le coût pour trouver les fuites: 325 000 $US. Le coût quant à la réputation de l'entreprise: incommensurable», lance Paul Saffo, chercheur pendant de longues années à Silicon Valley et professeur à l'Université Stanford. «Tout le monde a tellement été obnubilé par la régularité de cette affaire que l'éthique a été oubliée», ajoute-t-il.

Hewlett-Packard, de Palo Alto, en Californie, deuxième fabricant mondial d'ordinateurs personnels, a versé plus de 51 000 $US pour mettre la main sur des registres d'appels personnels obtenus dans le cadre de l'enquête, selon une facture du 2 mai dernier soumise par Ronald DeLia, de Security Outsourcing, une firme de Boston qui a surveillé un réseau d'enquêteurs chargés de rassembler des informations au nom de Hewlett-Packard. Cette enquête, au nom de code Kona II, s'est déroulée de décembre 2005 à avril dernier, selon la facture de M. DeLia, qui a atteint 325 641,65 $US.

Hewlett-Packard a reconnu le 6 septembre dernier que des enquêteurs avaient utilisé de fausses identités pour avoir accès à des registres d'appels, ce qui s'appelle soutirer des informations confidentielles, une pratique qui pourrait être illégale. D'ailleurs, Bill Lockyer, le procureur général de la Californie, a déjà dit qu'il examinait la possibilité d'inculper des dirigeants de Hewlett-Packard et des entrepreneurs tiers à la suite de cette enquête sur les fuites.

M. Hurd dit qu'il s'est peut-être souvenu d'avoir entendu, au cours d'une réunion du 22 juillet 2005, que des registres d'appels téléphoniques avaient été obtenus à partir du Web, selon une entrevue qu'il a eue le 25 août dernier avec des avocats du cabinet Wilson Sonsini Goodrich & Rosati, dans le cadre de leur examen de l'enquête. M. Hurd a dit qu'il n'était pas au courant que des pratiques douteuses avaient été mises à contribution pour soutirer des informations confidentielles, soit des registres d'appels téléphoniques, selon un sommaire de trois pages de son entrevue avec les avocats.

Le Comité de la Chambre a publié 700 pages se rapportant à l'enquête après que Mme Dunn, M. Hurd, un avocat de l'extérieur, Larry Sonsini, et Fred Adler, le chef de la sécurité interne chez Hewlett-Packard, eurent passé environ sept heures à subir les attaques des législateurs américains qui ont blâmé la firme pour sa gestion de l'enquête. Le représentant John Dingell a qualifié l'affaire d'«étude de cas de tromperie, de malhonnêteté, de comportement abusif» et d'exemple de «grossière stupidité».