Les doigts sur le clavier et les yeux rivés à l'écran, les 9-17 ans ont l'habitude de faire mille et une activités en même temps. Faut-il se méfier des impacts sur leur matière grise ?

Les doigts sur le clavier et les yeux rivés à l'écran, les 9-17 ans ont l'habitude de faire mille et une activités en même temps. Faut-il se méfier des impacts sur leur matière grise ?

Lorsque Sandrine revient de l'école, elle ouvre la télévision. Se branche à Internet pour clavarder avec ses copines. Navigue dans le Web tout en téléchargeant quelques chansons. Le tout, entre deux exercices de mathématiques. Un peu déroutant, tout ça ? «Pas du tout, c'est facile ! C'est la routine», lance la jeune fille de 14 ans.

Cette manie de faire plusieurs choses en même temps a un nom : le multitâche. C'est d'ailleurs l'élément qui a le plus marqué Leslie Shade, professeure en communication à l'Université Concordia, lorsqu'elle a réalisé une enquête sur l'usage des nouvelles technologies par les adolescents. «C'est tellement naturel pour eux, ils ne connaissent pas d'autres façons de faire !» affirme celle qui parle de la «génération multitâche».

Tandis que des experts estiment que cette génération, très stimulée, sera ainsi plus apte à faire face à l'exigeant rythme de travail qui les attend, d'autres voix s'élèvent pour mettre les enfants - et les parents - en garde contre cette «suractivité».

Trouble de l'attention

Une des plus importantes études menées aux États-Unis, publiée dans le Journal of Experimental Psychology, en 2001, montre que carburer au multitâche peut entraîner une baisse d'efficacité et un stress qui peuvent, éventuellement, perturber le fonctionnement du cerveau.

«Passer constamment d'une activité à l'autre peut avoir un coût», explique Pierre Jolicoeur, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en sciences cognitives expérimentales à l'Université de Montréal.

M. Jolicoeur rappelle que notre cerveau a des capacités limitées : plus les activités combinées sont complexes ou variées - un exercice d'algèbre entrecoupé de quatre ou cinq conversations MSN, par exemple - , plus le niveau de distraction sera grand et plus les impacts seront négatifs.

Le psychiatre américain Edward Hallowell va plus loin en estimant que le multitâche est la source d'une nouvelle forme de détresse psychologique. Causé par ces technologies qui bombardent le cerveau d'informations, ce trouble de l'attention guetterait les adultes au boulot, mais aussi leurs enfants accrochés à leur ordinateur portable, iPod et téléphone cellulaire en poche.

«Les jeunes, à force d'être surstimulés, perdent leur capacité de concentration», écrit-il en substance dans son dernier essai, CrazyBusy.

Mais ce constat n'est pas nouveau. Déjà, au début des années 90, une haute dirigeante de Microsoft, Linda Stone, en était arrivée au même constat : en étant sollicités de toutes parts par de nouvelles technologies, les utilisateurs deviennent incapables de se concentrer à 100 %. Connu sous le nom de continuous partial attention, ce phénomène n'a fait qu'empirer au cours des dernières années, affirmait-elle récemment lors d'une conférence prononcée aux États-Unis.

Pour éviter les pièges du multitâche, les experts recommandent aux adolescents de faire... une chose à la fois. Tout simplement.

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