En avril 2005, Ray Ozzie, responsable technique en chef de Microsoft, a tenu une réunion avec des ingénieurs qui tentaient de régler un problème relevé par Steve Ballmer, le chef de la direction de la compagnie: le logiciel Office, de Microsoft, ne s'intégrait pas bien aux services MSN Internet.

En avril 2005, Ray Ozzie, responsable technique en chef de Microsoft, a tenu une réunion avec des ingénieurs qui tentaient de régler un problème relevé par Steve Ballmer, le chef de la direction de la compagnie: le logiciel Office, de Microsoft, ne s'intégrait pas bien aux services MSN Internet.

En poste depuis quelques semaines seulement, M. Ozzie prêta l'oreille à plusieurs propositions compliquées, puis il souligna qu'un logiciel disponible dans le public était en mesure de solutionner l'anomalie. «On l'a perçu alors comme le grand simplificateur», indique Blake Irving, vice-président de MSN.

Cette réputation a permis à M. Ozzie d'obtenir en juin dernier le poste d'architecte en chef des logiciels de Microsoft. Il remplace ainsi le fondateur Bill Gates à titre de principal visionnaire de la première compagnie de logiciels au monde.

M. Ozzie, 50 ans, créateur du programme de courriel Lotus Notes dans les années 80, sera le principal artisan de la tentative de Microsoft de transformer ses produits Windows et Office en pierre angulaire de services et d'outils offerts sur Internet pour concurrencer ceux d'autres sociétés, comme Google.

Après avoir manifesté de l'intérêt pour l'embauche de M. Ozzie pendant plus de deux décennies, MM. Gates et Ballmer ont vu leur chance de mettre le grappin sur l'ancien programmeur lorsqu'ils ont acquis sa compagnie, Groove Networks, contre 120 millions US en mars 2005. Ils souhaitaient que M. Ozzie leur fasse profiter de son expérience en matière de fonctionnement de logiciels fondés sur Internet et qu'il propose une nouvelle perspective à Microsoft, souligne Mitch Kapor, ancien PDG de Lotus.

Quand Bill Gates a commencé à songer à mettre un terme à son implication quotidienne dans les activités de Microsoft, société établie à Redmond, dans l'État de Washington, les cadres supérieurs se sont mis à la recherche d'un remplaçant.

«Pas de doute que nous avions ça à l'esprit lorsque nous avons fait l'acquisition de Groove», admet Jeff Raikes, président de Microsoft, qui a négocié la transaction à titre de responsable de la division Office de Microsoft.

M. Ozzie s'est déjà fait des appuis au sein de Microsoft en se concentrant sur le lancement plus rapide de nouveaux produits et en rendant les logiciels plus faciles d'utilisation.

Nouvelles versions retardées

Le talent de M. Ozzie pour réduire la bureaucratie et sa capacité de trouver des solutions simples seront des éléments cruciaux pour la compagnie, aux prises avec les retards dans le lancement de nouvelles versions de Windows et d'Office.

Entre temps, Google a lancé de nouveaux produits à un rythme d'enfer, y compris un logiciel pour rechercher des fichiers dans les ordinateurs personnels et capable de créer des feuilles de calcul électronique qui peuvent être mises à jour par de nombreux utilisateurs sur le Web.

Les services Internet auxquels Microsoft songe seraient destinés au grand public et aux entreprises. Microsoft offre un logiciel en ligne qui fonctionne de concert avec son produit Office pour PC et qui aide les compagnies à gérer les comptes clients. L'entreprise propose aussi un logiciel fondé sur le Web qui permet aux consommateurs d'acheter et de vendre des biens sur Internet.

Selon les propres estimations de M. Ozzie, l'enjeu est grand au moment où Microsoft tente de se transformer en une compagnie axée sur les services Internet.

«Si nous ne réagissons pas rapidement, notre affaire comme nous la connaissons est en péril», soulignait-il dans une note transmise aux cadres en octobre dernier.

Microsoft a surpris les investisseurs lorsqu'il a prédit en avril dernier que les bénéfices dégagés au cours de l'exercice terminé le 30 juin serait de 30 cents US par action sur des ventes de 11,5 milliards US à 11,7 milliards US, soit moins que la moyenne de 34 cents par action prévue par les analystes sondés par Thomson Financial.

Le titre de Microsoft a perdu 11,4 % le 28 avril, pire dégringolade en plus de cinq ans au moment où la compagnie annonçait qu'elle augmenterait ses investissements au cours de l'exercice commençant le 1er juillet.

Les dépenses au dernier trimestre et pendant tout l'exercice comprennent des coûts pour mettre davantage de consoles de jeu Xbox sur le marché avant le PlayStation de son concurrent Sony, de même que des embauches, de la recherche et des dépenses en capital pour mettre sur pied des services Internet pour concurrencer Google.

Au cours du dernier trimestre, l'action de Microsoft a reculé de 14 %, sa pire performance depuis septembre 2002. Google a posé un défi à Microsoft en allant chercher des revenus de publicités liées à des recherches sur Internet.

De son côté, M. Gates a décidé de scinder son groupe Outils et plateforme Internet, au sein de Microsoft, et de confier le développement du navigateur Explorer au groupe Windows, ce qui a entraîné pour Microsoft la perte de patrons de la division Internet tels que Brad Silverberg, qui était premier vice-président.

Depuis la fin des années 90, les dépenses consacrées au navigateur Explorer ont été réduites à environ 10 % des niveaux précédents, selon Matt Rosoff, analyste de la firme Directions on Microsoft, de Kirkland, dans l'État de Washington.

La décision de Microsoft de son concentrer sur Windows au détriment de son logiciel Internet a fait en sorte qu'il a été impossible pour Microsoft d'obtenir un rôle de leader sur Internet, croit Roger McNamee, fondateur de Elevation Partners, de Menlo Park, en Californie. Et M. Ozzie ne sera pas en mesure de rattraper le terrain perdu, soutient-il.