Bien que l'industrie des technologies de l'information ait, de tout temps, éprouvé de la difficulté à attirer les femmes, la situation, loin de s'améliorer, se détériore depuis quelques années. Et pourtant, lorsqu'on l'examine de plus près, le secteur aurait de quoi leur plaire. N'est-ce alors qu'une question de quelques mythes à défaire?

Bien que l'industrie des technologies de l'information ait, de tout temps, éprouvé de la difficulté à attirer les femmes, la situation, loin de s'améliorer, se détériore depuis quelques années. Et pourtant, lorsqu'on l'examine de plus près, le secteur aurait de quoi leur plaire. N'est-ce alors qu'une question de quelques mythes à défaire?

«Comment se fait-il que nous soyons si peu nombreuses dans l'univers des technologies de l'information (TI) alors que la qualité de vie y est supérieure à la moyenne et que nos emplois ne sont pas menacés?» s'interroge Nicole Martel, présidente-directrice générale du Réseau inter logiQ, organisme voué à la commercialisation des entreprises dans le secteur des TI.

Rappelons tout d'abord que moins de 2 % des postes de direction (présidence et vice-présidence) sont actuellement occupés par des femmes dans l'industrie des TI.» Sur un total de 300 entreprises membres du Réseau inter logiQ, seulement deux sont dirigées par des femmes, déplore Nicole Martel. Autrement dit, les femmes ne sont pas là où les décisions se prennent. La situation est encore plus catastrophique aux conseils d'administration (CA) où elles sont quasiment absentes.»

Et pourquoi les femmes ne participent-elles pas à des CA? «Peut-être n'y sont-elles pas conviées puisqu'elles fréquentent moins les réseaux. Toutefois, lorsqu'il m'est arrivé d'en inviter à mon conseil, leurs réponses étaient toutes les mêmes: pas le temps avec les enfants. Jamais un homme ne m'a servi un tel argument. Au contraire, ces derniers saisissent bien l'importance d'adhérer à des réseaux pour faire avancer leur carrière.»

Un secteur d'avenir

Et pourtant, sur le plan statistique, les données ont tout de même de quoi séduire: au Canada, l'industrie des technologies de l'information embauche 550 000 travailleurs et présente un taux de chômage d'à peine 3 % alors que la moyenne nationale s'élève à 8 %.

Autres attraits: 61 % des employés du secteur gagnent entre 37 000 $ et 61 000 $ par année, soit 50 % de plus que la moyenne au pays. En outre, depuis l'an 2000, les salaires moyens dans cette industrie ont connu une hausse plus importante que dans tous les autres domaines.

En dépit de ces charmes non négligeables, les femmes délaissent progressivement le secteur. À preuve, leur représentation est passée de 25,3 % en l'an 2000 à 23,8 % en 2005, selon une étude effectuée par le Conseil des ressources humaines de logiciel (CRHL) et Statistiques Canada.» Phénomène encore plus préoccupant: leurs inscriptions dans les universités et les cégeps dans des programmes en TI ne cessent de chuter depuis quelques années, rapporte Nicole Martel. En fait, les femmes représentent moins de 10 % des étudiants dans ce secteur. Sans compter que sur ce nombre, toutes n'obtiendront pas leur diplôme!»

Ce qui laisse présager de sérieux problèmes de relève dans cette industrie délaissée également par les hommes. On y prévoit d'ailleurs une importante pénurie de main-d'oeuvre à partir de 2011, quand les baby-boomers quitteront massivement pour prendre leur retraite.

À bas les mythes

Et pourquoi cette industrie n'arrive-t-elle pas à intéresser les femmes? «Malheureusement, l'image négative de l'intello asocial qu'on nourrit en glissant des pointes de pizza sous la porte de son laboratoire reste encore bien ancrée dans l'imaginaire collectif, affirme Nicole Martel. Et pourtant, le profil des travailleurs y a considérablement changé au cours des dernières années. On y fait bien plus que de la programmation.»

À cet égard, de récentes études révèlent que les qualités désormais recherchées chez un travailleur dans ce secteur sont d'abord sa capacité à travailler en groupe, à communiquer, à rallier des équipes multidisciplinaires autour d'un projet, à comprendre les besoins du client, à élaborer des stratégies d'affaires et à les faire exécuter par des programmeurs, etc. Les compétences techniques ne viennent désormais qu'au deuxième rang.

Des aptitudes que l'on retrouve, à bien considérer, chez plusieurs femmes.

Autre mythe à briser: plusieurs croient que les travailleurs du secteur n'ont pas de vie et qu'ils ne cessent d'accumuler les heures supplémentaires. La réalité: à peine 9 % d'entre eux consacrent plus de 40 heures par semaine à leur emploi.» Bien au contraire, cette industrie permet le télétravail, des horaires flexibles, commente Nicole Martel, ce qui n'est pas le cas dans les secteurs de la santé, des banques et des services sociaux.»

«Les milliers de licenciements faits- en l'occurrence chez Nortel- à la suite de l'éclatement de la bulle Internet ont aussi frappé l'imaginaire collectif car ils ont été largement médiatisés, poursuit Nicole Martel. Toutefois, les médias ont oublié de préciser que la majorité de ces travailleurs se sont facilement replacés par la suite. Ainsi, l'industrie des TI s'avère encore et toujours un secteur d'avenir. Il serait donc temps que les femmes y prennent leur place et profitent davantage des nombreuses possibilités de carrières qui leur sont proposées.»

Liette D'Amours est directrice des communications au CEFRIO, un centre de recherche-action et de transfert spécialisé en appropriation des technologies de l'information.