L'Ordre des ingénieurs souhaite encadrer les informaticiens qui conçoivent des logiciels. Une nouvelle confrontation pointe à l'horizon.

L'Ordre des ingénieurs souhaite encadrer les informaticiens qui conçoivent des logiciels. Une nouvelle confrontation pointe à l'horizon.

L'Office des professions du Québec a mis sur pied il y a plus d'un an un groupe de travail qui devrait, d'ici l'automne prochain, apporter des recommandations pour une éventuelle modification de la Loi sur les ingénieurs.

L'Ordre des ingénieurs du Québec (OIQ) est représenté à ce comité. Son président, Gaétan Samson, affirme que réviser la loi est nécessaire. «Nous voulons redéfinir le champ de pratique des ingénieurs en fonction de la nouvelle réalité, qui a beaucoup évoluée depuis 40 ans».

Le comité n'a pas encore émis une recommandation que déjà, un vent de contestation se lève dans le monde de l'informatique, qui a déjà eu à débattre de la question dans les années 90.

«À cette époque, les démarches n'ont pas abouti à un changement de la loi, rappelle Gaétan Samson. Le chantier a été repris récemment.»

Les revendications de l'Ordre des ingénieurs sont sensiblement les mêmes qu'il y a dix ans. «Tant pour le génie logiciel que pour les nouveaux génies qui vont poindre au cours des 30 prochaines années, nous pensons que chaque fois que la sécurité du public risque d'être mise en cause, la pratique du professionnel doit être encadré», dit Gaétan Samson.

Des modifications nécessaires?

Au Réseau inter logiQ, qui représente 300 entreprises en technologies de l'information, on croit que les informaticiens en génie logiciel n'ont pas à faire partie de l'Ordre des ingénieurs.

«Les informaticiens qui oeuvrent au sein des entreprises en technologie se conforment déjà à beaucoup de normes, par exemple pour les langages de programmation, dit sa présidente Nicole Martel. On croit que les intérêts du public sont déjà bien protégés par les cours d'informatique auxquels se conforment les 60 000 informaticiens en génie logiciel au Canada.»

Advenant une modification de la loi, les informaticiens en génie logiciel qui ne sont pas ingénieurs devraient peut-être retourner sur les bancs d'école pour compléter leur formation en génie.

«C'est par la formation que les gens entrent à l'OIQ. Il existe actuellement des équivalences de profession qui sont étudiées à la pièce. Si on le fait pour les étrangers, c'est sur qu'on va le faire pour des gens qui sont promus d'autres écoles que les écoles d'ingénieries», dit Gaétan Samson.

«Ce serait complètement inutile, croit quant à lui le directeur du baccalauréat en informatique et génie logiciel de l'UQAM, Guy Tremblay. Ce serait ne pas reconnaître toute l'expertise qui a été développée depuis 1968 par les informaticiens.»

Guy Tremblay croit que choisir le terme génie logiciel pour désigner les informaticiens qui conçoivent des logiciels a peut-être été une «erreur historique», particulièrement au Québec où existent des «les chicanes de territoire».

«La question fondamentale c'est: le génie logiciel est-il du génie? Nous, informaticiens, prétendons que c'est une forme d'application du génie, mais que c'est avant tout de l'informatique, dit-il. Quand vous concevez des systèmes informatiques, c'est très rare que vous ayez besoin de connaissances en chimie, en physique ou en structure des matériaux. Ce sont des cours qui sont obligatoires pour tous les ingénieurs. Ce sont deux mondes.»

Au Réseau inter logiQ, on plaide pour le statut quo. «La pratique du génie logiciel comme elle se fait actuellement est correcte, dit Nicole Martel. Ne bousculons pas l'industrie plus qu'il ne le faut. Déjà les dernières années n'ont pas été très faciles pour les technologies de l'information.»

Elle croit que l'adoption de modifications à la Loi des ingénieurs pour intégrer les informaticiens en génie logiciel serait néfaste pour l'industrie.

«On nous laisse entendre que dès la date où la réglementation est appliquée, les informaticiens seraient obligés de retourner sur les bancs d'école. Ça créerait une rareté des ressources et un accroissement des coûts. Ce serait très difficile pour nos entreprises de faire face à cette pénurie de ressources.»

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