L'imprimante de votre ordinateur peut révéler des choses que vous ne soupçonniez pas: un organisme de défense du droit à la vie privée vient de décrypter un code secret imprimé systématiquement par des dizaines d'appareils laser couleur à l'insu des utilisateurs.

L'imprimante de votre ordinateur peut révéler des choses que vous ne soupçonniez pas: un organisme de défense du droit à la vie privée vient de décrypter un code secret imprimé systématiquement par des dizaines d'appareils laser couleur à l'insu des utilisateurs.

Ce code, composé de petits points jaunes dispersés à des endroits spécifiques sur les documents imprimés, révèle entre autres choses le numéro de série de l'imprimante qui les a produits. Il indique aussi la date et l'heure précise, à la seconde près, de l'impression du document.

Xerox, Canon, Brother, HP, Epson et plusieurs autres entreprises ont accepté d'intégrer ces cryptogrammes dans le cadre d'un programme conclu avec les autorités américaines et un consortium de banques. Cette mesure vise à limiter la contrefaçon de faux billets.

L'existence du code secret était connue des groupes de défense du droit à la vie privée depuis plus d'un an, mais sa signification demeurait mystérieuse.

L'organisme américain Frontière électronique, qui a réussi à décrypter le code sur une imprimante de marque Xerox et qui s'attaque maintenant à celui des autres manufacturiers, voit dans ce système un sérieux risque d'intrusion dans la vie privée.

«C'est très inquiétant que cela soit fait dans le plus grand des secrets, dans le dos de la population, affirme Kevin Bankston, avocat de la filiale américaine de Frontière électronique. Les autorités peuvent se servir de ce code pour identifier les auteurs d'un document grâce au numéro de série. Ce serait une grave atteinte au droit à la liberté d'expression.»

« On peut aussi imaginer un cas où un individu se sert de ce code secret pour poursuivre une personne au civil ou encore pour la faire chanter. Si nous sommes parvenus à briser ce code, n'importe qui peut le faire », ajoute M. Bankston.

Interrogé par La Presse, un porte-parole de Xerox, Bill McKee, a assuré que «l'entreprise ne partage avec personne les informations sur sa clientèle. Cette technologie ne sert pas à suivre la trace de documents individuels», a-t-il soutenu.

Pour Frontière électronique, cette réponse n'est cependant pas suffisante: «Xerox et les autres manufacturiers peuvent bien dire qu'ils ne transmettent à personne les informations sur leurs clients. S'il n'y a pas de politique écrite sur la vie privée pour appuyer ces affirmations, ça ne vaut rien.»

Aux États-Unis, le Secret Service, responsable des questions de contrefaçon, a assuré que le code peut uniquement être utilisé par les forces de l'ordre pour coincer les fraudeurs qui se livrent à cette activité.

La Banque du Canada, qui a le mandat d'enquêter sur la contrefaçon au pays, affirme pour sa part ne pas se servir de cette technologie. «Nous sommes au courant de son existence, mais nous n'utilisons que des technologies informatiques pour prévenir la contrefaçon, pas pour retrouver les fraudeurs», a indiqué la porte-parole Monica Lamoureux.

La GRC, de son côté, n'a pas été en mesure de commenter ces informations.

Pour consulter la liste des imprimantes qui impriment le cryptogramme et pour apprendre comment le décoder:

https://www.eff.org/Privacy/printers