C’est du jamais vu pour un studio indépendant du Québec. En une semaine, le studio montréalais Red Barrels a écoulé plus de 500 000 exemplaires de The Outlast Trials, nouvel opus de sa franchise phare.

L’exploit est d’autant plus notable qu’il ne s’agit pas d’une version finale, mais d’un « accès anticipé » appelé à être amélioré, offert uniquement en version pour PC au prix de 38,99 $. Lancé le 18 mai sur Steam, The Outlast Trials a reçu un bulletin de 10 850 évaluations jugées « très positives ». Au moment où nous écrivions ces lignes, quelque 26 000 joueurs se débattaient simultanément en ligne pour échapper aux fous furieux peuplant le jeu. Ce jeu d’horreur-survie multijoueurs baignant dans une ambiance psychotique, très sanglant, n’a manifestement pas effarouché les acheteurs.

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Philippe Morin, cofondateur et designer de jeu chez Red Barrels

« C’est le fun qu’après avoir tant travaillé, après tous les efforts que l’équipe a mis sur ce projet-là depuis six ans, il y ait une récompense qui survient », se réjouit Philippe Morin, cofondateur et designer de jeu chez Red Barrels.

On a un peu le feeling d’avoir gagné la Coupe. La semaine qu’on vient de vivre, on n’a jamais vécu ça dans le passé.

Philippe Morin, cofondateur et designer de jeu chez Red Barrels

Entre scénario et renouvellement

Red Barrels et ses 45 employés s’y connaissent quelque peu en matière de succès, les deux premiers opus de sa franchise Outlast s’étant écoulés à quelque 20 millions d’exemplaires depuis 2013, pour des revenus de 95 millions, selon les données fournies par M. Morin. « En une semaine, The Outlast Trials s’est écoulé à plus d’unités qu’Outlast 2 en un an, et [a généré] plus de revenus qu’Outlast 1 », précise-t-il.

Le seul studio indépendant québécois à naviguer dans ces eaux est Behaviour Interactive, qui compte un millier d’employés et dont le jeu Dead by Daylight attire 50 millions de joueurs en ligne. Un des beaux succès indépendants des dernières années, Ancestors, du studio Panache fondé par Patrice Désilets, avait mis deux ans après son lancement en août 2019 pour atteindre le million d’unités vendues.

The Outlast Trials est un concept hybride, entre le jeu au scénario achevé et la plateforme à la Fortnite régulièrement enrichie de nouveaux contenus. Si le joueur qui y plonge a accès à des « épreuves » (trials en anglais) et une progression jusqu’à l’affrontement final, le déroulement du jeu est sans cesse modifié, varie selon les choix du joueur et sera alimenté en nouveautés dans les prochaines années. Et s’il est possible d’y jouer en solo, il est nettement plus facile et gratifiant de se joindre à un groupe en ligne pour que son personnage ait des chances de réussite.

« On essaie d’être hybride entre une structure qui favorise la rejouabilité et la progression de son personnage, pour le faire évoluer jusqu’à ce que tu atteignes un point où tu mérites de passer le test final », explique M. Morin.

Sur les listes d’envie

Détail technique qui peut sembler anodin, offrir un jeu coopératif à tous les joueurs sans abonnement implique une infrastructure informatique coûteuse. Un succès comme The Outlast Trials est réjouissant pour le studio, mais signifie qu’après avoir payé ses 38,99 $, le joueur continue de recevoir un service pour lequel il ne paie plus. « Nous avons des serveurs sur Amazon, on va recevoir une belle facture, note en riant Philippe Morin. C’est pour ça qu’après le lancement de la version 1.0, prévue d’ici la fin de l’année, il faut que les revenus continuent de rentrer. Avec des éléments cosmétiques, des DLC [contenus téléchargeables additionnels] ? On y va une étape à la fois. »

Outre le demi-million d’exemplaires vendus, The Outlast Trials a été ajouté à 1,2 million de « listes d’envie » par des joueurs qui ont de bonnes chances d’acheter la version finale, note-t-il. « Le jeu va avoir une bonne durée de vie. » On estime que le tiers des acheteurs sont aux États-Unis, un cinquième en Chine, avec quelques points de pourcentage de joueurs en Allemagne, en Turquie, en Argentine, au Royaume-Uni et au Canada.

Lisez notre critique de The Outlast Trials