(Londres) Londres se voit en champion post-Brexit de la technologie, mais « l’Union européenne est un endroit plus attractif pour créer une entreprise que le Royaume-Uni », a taclé jeudi le président de Microsoft Brad Smith dans une interview à la BBC, au lendemain d’un revers sur la fusion avec Activision.

L’autorité britannique de la concurrence (CMA) a mis en péril mercredi la mégafusion entre Microsoft et Activision Blizzard en annonçant sa décision de bloquer l’opération — les deux entreprises ont annoncé faire appel dans la foulée.

La décision de la CMA a été « le jour le plus sombre des quatre décennies (de Microsoft) en Grande-Bretagne », a affirmé M. Smith à la chaîne britannique, « mais plus que cela, malheureusement, je pense que c’est mauvais » pour le pays, a-t-il assuré.

« Cela ébranle plus que jamais notre confiance dans les opportunités futures pour développer une entreprise technologique en Grande-Bretagne », a-t-il poursuivi, estimant que Londres « doit examiner attentivement le rôle de la CMA ».

Un porte-parole de Downing Street a relativisé ces propos en relevant que la CMA est un organe « indépendant » du gouvernement, et notant que le marché britannique des jeux est en pleine santé, « valant 2000 milliards de livres en 2021, avec plus de 80 000 emplois créés ».

Il a ajouté que le gouvernement britannique continue de dialoguer « de manière proactive avec Microsoft et d’autres entreprises » technologiques.

La CMA avait dit craindre « une innovation réduite et moins de choix pour les joueurs britanniques » sur le marché en pleine croissance des jeux dématérialisés (« cloud gaming »), qui offrent aux utilisateurs la possibilité de jouer en flux, notamment sur leurs téléphones portables.

« Nous voulons créer un environnement dans lequel une multitude d’entreprises différentes peuvent rivaliser efficacement, se développer et innover », a défendu jeudi, également sur la BBC, la directrice générale de la CMA Sarah Cardell.

Les inquiétudes sur cette fusion ne sont pas limitées au Royaume-Uni : l’UE a également ouvert une enquête, pour savoir si elle rendrait les jeux d’Activision exclusifs à la Xbox. La Commission européenne doit se prononcer d’ici au 22 mai.

L’opération suscite aussi des craintes outre-Atlantique, où l’autorité américaine de la concurrence (FTC) a lancé en décembre des poursuites pour la bloquer.

Le marché du Royaume-Uni est plus petit que celui des États-Unis ou de l’Union européenne, mais si le blocage de Londres est confirmé en appel, il pourrait contraindre Microsoft à renoncer à cette opération.

La CMA avait déjà l’an dernier obtenu gain de cause, après une procédure en appel, pour contraindre Meta, la maison mère de Facebook, à vendre la start-up de graphiques animés Giphy.