La sommité montréalaise en intelligence artificielle Yoshua Bengio pourra ajouter une nouvelle reconnaissance à une liste déjà impressionnante : il fera son entrée dans le Petit Larousse illustré 2023.

Décoré de la Légion d’honneur française en mars dernier, fait officier de l’Ordre du Canada et récipiendaire du prix Turing en 2018, considéré comme l’un des trois « parrains de l’apprentissage profond », M. Bengio explique avoir reçu cette dernière distinction avec « un peu d’incrédulité ».

« Tous ces prix, je ne les aurais pas imaginés il y a quelques années », a avoué l’informaticien lors d’une rencontre virtuelle avec les journalistes. « Ça m’amène à me recentrer sur l’humilité, qui est importante dans ces situations. La science, ce ne sont pas deux ou trois personnes qui la font avancer, ce sont les équipes, des étudiants qui n’ont pas nécessairement de reconnaissance, une communauté. »

La courte description de M. Bengio dans la prochaine édition du Larousse le présente comme un « informaticien canadien » né en 1964 à Paris, « précurseur des réseaux de neurones artificiels et du deep learning » qui a développé « une technologie d’apprentissage automatique utilisée dans la reconnaissance vocale des téléphones et la traduction de langues ». On note également ses préoccupations pour les « enjeux soulevés par les applications de l’intelligence artificielle ».

Le principal intéressé s’est dit satisfait de ce résumé d’une longue carrière entamée fin des années 1980. « Ça me semble correct, ils ont fait du bon travail. Ils ne m’ont pas consulté, je n’ai pas donné d’autorisation. »

Enjeux moraux

S’il convient que ce type de reconnaissance a peu d’incidence dans la communauté scientifique – à l’exception du prix Turing, considéré comme le Nobel de l’informatique –, il estime qu’il peut aider à véhiculer certaines valeurs auxquelles il aimerait voir la population et les élus adhérer. « Comme citoyens, il y a des décisions à prendre, ce qu’on veut, ce qu’on ne veut pas […]. Il faut que la population soit consciente des enjeux moraux, éthiques, d’abus, militaires, etc. qui ne sont pas nécessairement intéressants pour le commun des mortels. »

De sa propre initiative, il a tenu à souligner l’importance pour lui d’une autre distinction qu’il a reçue la semaine dernière, le prix espagnol Princesse des Asturies. « J’ai un lien affectif avec l’Espagne, a-t-il expliqué. Ma famille est originaire du Maroc, trois de mes grands-parents sont de langue maternelle espagnole. Ce sont des familles sépharades qui ont quitté l’Espagne en 1492 et qui ont gardé la langue. »