(Paris) Bientôt la fin des « cookies » ? Google a présenté mardi un nouveau système pour mettre fin à ces fichiers permettant de mieux cibler les internautes, un projet redouté par le monde de la publicité numérique qui tient à ces précieuses données.

Outre Google, Apple s’est également lancé dans une bataille contre les « témoins tiers », des traceurs numériques extérieurs au site consulté, qui permettent de suivre les navigations des usagers du web et d’analyser leur comportement pour leur envoyer des offres ciblées, ayant le plus de chance de déclencher un achat.

Dans le système - encore en développement - présenté mardi, le principe serait que l’internaute lui-même ait la main sur son profil publicitaire, via son navigateur Chrome.

Selon le groupe américain, Chrome identifierait des thèmes « représentatifs des principaux centres d’intérêt » de l’internaute « pour une semaine donnée, tels que “fitness” ou “voyages”, en fonction de l’historique de navigation ».  

Ces thèmes seraient « gardés en mémoire » pour permettre de générer d’éventuelles publicités ciblées « pendant seulement trois semaines, avant d’être supprimés », a précisé Google.

Ce processus se passerait « entièrement sur l’appareil utilisé, sans impliquer de serveurs externes, y compris les serveurs Google », a précisé l’entreprise.

Les internautes auraient à disposition des « paramètres de contrôle » leur « permettant de voir les thèmes partagés, de supprimer ceux qu’ils n’apprécient pas, ou encore de désactiver entièrement la fonctionnalité ».

Le système remplace un autre système proposé en février 2021 par Google, et qui ne semble pas avoir donné satisfaction.

Mise en œuvre « d’ici la fin 2022 »

À l’époque, le groupe avait proposé un autre système dit du « ciblage par cohorte » : il s’agissait d’éviter de cibler les individus, en constituant plutôt un groupe d’individus ayant des caractéristiques similaires (centre d’intérêt, etc.), repérés par un identifiant unique.

Les nouvelles propositions faites mardi sont pour l’instant « au stade de concept » et doivent être discutées désormais avec les professionnels du web, a indiqué Google.

« L’objectif est de faire en sorte que ces technologies soient déployées d’ici la fin de l’année 2022 », pour que les acteurs de l’internet « puissent démarrer leur adoption dans la foulée », a-t-il ajouté.

Les éditeurs de sites et les acteurs du marché publicitaire sont de leur côté très inquiets de la volonté de Google d’éliminer les témoins publicitaires.

Un groupement d’éditeurs allemands, dont le géant Axel Springer qui publie notamment Bild, vient ainsi de saisir la Commission européenne pour se plaindre de l’initiative du géant américain de la recherche sur l’internet, a rapporté lundi le Financial Times.

Le nouveau modèle prôné par le géant américain « affectera le marché de la publicité et perturbera le modèle commercial de la presse numérique », avaient déjà dénoncé, en mars 2021, l’Association européenne des médias magazine (EMMA) et l’Association européenne des éditeurs de journaux (ENTA).

Il permettrait « en fin de compte » à Google « d’étendre davantage son propre monopole sur les données », ajoutaient ces associations, puisqu’il ne sera « plus possible pour des tiers de comprendre et de traiter les enregistrements de données de manière significative ».

En janvier 2021, le gendarme britannique de la concurrence avait annoncé l’ouverture d’une enquête sur les changements annoncés par Google sur les fichiers témoins.  

Google a proposé des engagements en réponse à cette procédure, qui, s’ils sont acceptés par l’autorité de la concurrence britannique (CMA), auront valeur dans le monde entier.

Ces engagements prévoient notamment que « les produits publicitaires et les sites Google ne bénéficient pas de traitement préférentiel ou d’avantages » du fait de ces nouveaux systèmes.

Le géant américain détenait, à lui seul, 28,6 % du marché publicitaire numérique mondial en 2021, selon le cabinet eMarketer, juste devant Facebook et ses 23,7 % de la part du gâteau.