(Washington) Des parlementaires américains ont réclamé jeudi, sans succès, à une dirigeante de Facebook que le groupe s’engage à protéger davantage les enfants qui utilisent ses plateformes, au cours d’une audition tendue.

L’entreprise de Menlo Park, en Californie, avait annoncé lundi la suspension du travail sur cette version du réseau social pour les moins de 13 ans, mais le responsable d’Instagram, Adam Mosseri avait indiqué que le groupe croyait toujours au projet.

Jeudi, des membres de la commission au Commerce du Sénat américain ont saisi la balle au bond lors de l’audition d’Antigone Davis, responsable de la sûreté chez Facebook, pour demander à la dirigeante d’aller plus loin.

« Êtes-vous prêts à promettre que Facebook ne lancera pas de plateforme pour les enfants de 12 ans et moins qui leur permettrait de mesurer leur popularité ? », a lancé le sénateur démocrate Ed Markey, en référence aux boutons « like » (Facebook) ou aux cœurs que les utilisateurs peuvent cliquer sur Twitter, TikTok ou Instagram.

Antigone Davis a esquivé et a préféré insister sur le fait que, selon elle, les produits de Facebook « enrichissent » la vie en permettant à des adolescents de rester en contact avec leurs amis et leur famille.

Les élus ont également demandé à la responsable de promettre que le groupe publierait les résultats de ses recherches sur les effets des réseaux sociaux.

Dans un article publié mi-septembre, le Wall Street Journal a révélé que l’entreprise effectuait des recherches sur le sujet depuis trois ans, sur la base de documents fournis par un lanceur d’alerte.

Les études ont notamment montré que 32 % des adolescentes estimaient que l’utilisation d’Instagram leur avait donné une image plus négative de leur corps lorsqu’elles n’en étaient déjà pas satisfaites.

« Une bombe »

« Les adolescents reprochent à Instagram d’avoir fait augmenter l’anxiété et la dépression » chez les jeunes, disait un transparent produit par les chercheurs pour une présentation, toujours selon les documents transmis par le lanceur d’alerte.

Jeudi, Antigone Davis a expliqué que Facebook étudiait des moyens de publier davantage d’éléments sur ses recherches, mais qu’il devait prendre en compte des « questions de vie privée ».

Quelques heures avant l’audition, le géant aux 2,9 milliards de comptes actifs avait publié des documents pour réfuter la thèse développée par le Wall Street Journal, selon laquelle Facebook a conscience des problèmes que peut provoquer la fréquentation des réseaux sociaux chez les jeunes.

« Ces recherches sont une bombe », a dit le sénateur démocrate Richard Blumenthal, lors de l’audition, en référence aux documents qu’a fait fuiter le lanceur d’alerte. « C’est une preuve puissante, saisissante et captivante que Facebook connaît les effets néfastes qu’ont ses sites sur les enfants, et qu’il a cherché à le cacher. »

Le sénateur a comparé les méthodes de Facebook avec celles des grands cigarettiers, qui gardaient pour eux les conclusions de leurs recherches sur les dégâts que cause la consommation de tabac.

« Avez-vous changé votre fonctionnement après que ces études vous ont montré que ces produits augmentaient la probabilité de suicide chez ces adolescentes ? », a interrogé le sénateur républicain Ted Cruz.

Mme Davis a répondu que Facebook travaillait avec des experts de la prévention du suicide et avait créé des outils pour suggérer aux utilisateurs des structures spécialisées s’il apparaît qu’ils sont en difficulté psychologiquement.

Un lanceur d’alerte en lien avec Facebook doit être auditionné mardi devant les mêmes élus, qui n’ont pas indiqué s’il s’agissait de la personne à l’origine de la fuite des documents.