(Bruxelles) Géolocalisation déconseillée, consentement de l’utilisateur, technologies compatibles : l’Union européenne fixe des garde-fous et entend coordonner l’utilisation d’applications de traçage des contacts, adoptées par de nombreux pays pour accompagner la sortie du confinement.

Ces préconisations sont contenues dans une « boîte à outils » élaborée par la Commission européenne et les États membres, publiée jeudi.

Des recommandations doivent en outre être émises par l’exécutif européen pour assurer le respect des règles de l’UE sur la protection des données, par ces applications destinées à avertir un utilisateur d’un contact avec une personne infectée par le coronavirus.

Le développement de ces applications « et leurs interopérabilités doivent respecter pleinement nos valeurs et notre vie privée », a souligné le commissaire européen Thierry Breton, chargé du marché intérieur, après s’être entretenu de cette question avec le PDG de Google, Sundar Pichai.

Google et Apple, qui fournissent les deux principaux systèmes d’exploitation de téléphones dans le monde, collaborent pour une application de ce type.

Le document, élaboré par la Commission et les 27, répertorie les différentes applications à l’étude ou déjà mises en place dans les pays européens pour lutter contre la propagation du coronavirus, et notamment le type de technologie sur lesquelles elles s’appuient : Bluetooth, géolocalisation (Chypre, République tchèque), ou les deux (Norvège).

Pour l’UE toutefois, l’utilisation des « données de localisation n’est pas nécessaire ni recommandée ».  

« Recueillir des données sur les déplacements d’un individu dans le cadre d’une application de traçage des contacts violerait le principe de la “minimisation” des données collectées et poserait des problèmes majeurs de sécurité et de respect de la vie privée », estime-t-elle, reprenant l’avis du Comité européen de protection des données.

« Confiance »

Le document note en revanche que les initiatives du projet européen PEPP-PT, auquel participent notamment la France et l’Allemagne, utilisent le Bluetooth – qui permet à un téléphone d’identifier des appareils à proximité – et visent à garantir une confidentialité totale avec des outils « prêts à l’usage, dûment testés et validés ».

L’UE recommande que l’installation de ces applications, qui suscitent des débats au sein des États membres, se fasse sur une base volontaire, avec le consentement de l’utilisateur et qu’elles reposent sur des données anonymisées.  

Elles doivent respecter notamment le Règlement européen de protection des données (RGPD) et la directive « e-privacy », et être désactivées après la pandémie.

Autre recommandation : que ces outils soient conçus et utilisés « en étroite coordination et sous la supervision des autorités de santé publique compétentes ».

Le document prône aussi « l’interopérabilité » des systèmes entre pays européens : « Une approche fragmentée et non coordonnée des applications de traçage des contacts risque d’entraver l’efficacité des mesures destinées à combattre la crise de la COVID-19, tout en produisant des effets négatifs sur le marché commun et sur les droits et libertés fondamentaux ».

Il est nécessaire que « les citoyens circulant entre les pays bénéficient tous d’apps (applications) approuvées par les États membres ».

L’efficacité de ces applications dépend toutefois de leur adoption par une large majorité, note le texte, citant une étude de l’université d’Oxford selon laquelle il est nécessaire qu’entre 60 et 75 % de la population possède l’application pour qu’elle soit utile.

« C’est pourquoi nous devons être transparents », a expliqué le commissaire à la Justice Didier Reynders lors d’une vidéoconférence. « Si vous n’avez pas confiance dans l’utilisation par les autorités […] de vos données, vous aurez des hésitations à participer ».  

Pour l’UE, parallèlement à ces applications mobiles, le traçage des contacts effectué de façon traditionnelle par les professionnels de santé « va continuer à jouer un rôle important, en particulier pour ceux, comme les personnes âgées ou handicapées, qui peuvent être plus vulnérables à l’infection, mais ont moins de chance d’avoir un téléphone portable ou accès à ces applications ».