(Ottawa) Les avancées technologiques rapides en matière de collecte et d’analyse de données sont en train de transformer le mode de fonctionnement des agences de renseignement, mettant potentiellement en péril les libertés civiles.

C’est l’avertissement qu’a lancé l’expert israélien Shay Hershkovitz devant l’Association canadienne pour les études de renseignement et de sécurité, récemment réunie en congrès annuel au Musée canadien de la guerre à Ottawa.

Les organisations responsables d’assurer la sécurité des Canadiens doivent veiller à ce que leur vie privée et leurs droits fondamentaux ne soient pas compromis dans le processus, au risque de perdre la confiance de la population, prévient ce chercheur.

Une véritable révolution s’opère selon lui dans le monde de l’espionnage en raison du nombre grandissant d’appareils intelligents, du stockage de données quasi illimité et de l’avènement de l’intelligence artificielle.

« La transparence sera clé ici, et les législateurs devront limiter l’utilisation de ces technologies », estime cet ancien agent des services de renseignement israéliens.

M. Hershkovitz devait s’adresser en personne à des universitaires et responsables de la sécurité canadiens, mais des problèmes de santé l’ont contraint à avoir recours à une présentation préenregistrée.

D’ici l’an prochain, 50 milliards d’appareils seront connectés à l’internet. Ce chiffre devrait atteindre 100 milliards en 2025, soutient M. Hershkovitz, qui est responsable de la recherche à la Fondation XPRIZE.

« La conclusion inévitable est que, dans un avenir proche, dans environ cinq ans, des informations vont jaillir de toutes les rues, de toutes les voitures, de toutes les maisons et même du ciel. »

Le prix du stockage des données est pour sa part en chute constante. Le stockage d’un gigaoctet de données coûtait environ un demi-million de dollars en 1980, comparativement à seulement deux cents aujourd’hui, illustre M. Hershkovitz.

Et le flot de données ne fera qu’accélérer le développement de l’intelligence artificielle, prédit-il.

Les agences de renseignement avaient auparavant à choisir sur quels citoyens et groupes spécifiques ils souhaitaient amasser des informations. Aujourd’hui, ces mêmes agences n’ont plus à concentrer leurs ressources sur quelques cibles bien définies : elles peuvent se permettre de collecter et trier des informations à grande échelle et déterminer plus tard lesquelles s’avéreront pertinentes.

Les révélations faites ces dernières années par l’ancien sous-traitant des renseignements américains Edward Snowden au sujet de la surveillance généralisée des communications ont sensibilisé le public aux risques que posent les technologies numériques et la dépendance croissante de la société à leur égard.

Au Canada, une nouvelle législation contraint le Service canadien du renseignement de sécurité à obtenir l’autorisation d’un juge pour conserver des ensembles de données contenant principalement des informations personnelles de Canadiens.