Au cours de la dernière année, six nouveaux navires ont rejoint la flotte de Canada Steamship Lines, la division canadienne du groupe CSL des fils de Paul Martin. Ces laquiers moins gourmands en énergie ont été conçus au sein même des bureaux du transporteur montréalais. Ils lui permettront de respecter la réglementation environnementale de plus en plus exigeante. Et de garder leur place sur la voie maritime du Saint-Laurent, dans un marché en pleine évolution.

Les quatre autodéchargeurs et les deux vraquiers de la classe Trillium, qui ont été livrés depuis la fin de l'année 2012, consomment moins d'énergie que les 20 navires qui circulaient déjà sous le pavillon de CSL. Les émissions de particules et de gaz à effet de serre sont réduites grâce à des moteurs plus performants.

Le laquier Baie St.Paul utilise ainsi 15% de moins de carburant que les navires plus anciens. De plus, «tous les équipements ont été choisis pour optimiser la consommation énergétique à bord», souligne Louis Martel, président de la division canadienne de CSL. «Moins d'énergie utilisée, c'est moins de carburant consommé.»

C'est Canada Steamship Lines qui a elle-même conçu ses propres laquiers, une pratique peu courante dans le transport maritime. «Les laquiers sont très spécialisés, précise Louis Martel. Leur résistance est inférieure de moitié à celle des bateaux de mer, et ils sont beaucoup plus longs et étroits pour maximiser la cargaison transportée dans les écluses.» Canada Steamship Lines a donc sollicité ses ingénieurs et ses opérateurs pour déterminer les spécifications requises pour ses nouveaux navires.

Avec ses six nouveaux navires Trillium, CSL ambitionne de profiter de la libéralisation du marché du grain. Le monopole de la Commission canadienne du blé a pris fin il y a deux ans, et le marché est désormais ouvert. «Cela change la dynamique du commerce du grain», observe Louis Martel, ajoutant que «les belles récoltes de l'an passé engendrent un grand boom du grain dans les Grands Lacs».

Des bateaux flambants neufs, un marché du grain capable de pallier la diminution du transport du fer... Que pourrait demander de plus le patron de Canada Steamship Lines? Louis Martel souhaite que la voie maritime du Saint-Laurent conserve un positionnement avantageux par rapport à la concurrence d'autres voies de transport à l'intérieur de l'Amérique du Nord. Et de ce point de vue, les services de brise-glace posent problème, indique M. Martel. «Cette année, l'hiver a commencé tôt et a duré longtemps, constate-t-il. Cela fait peur à nos clients. Nous approvisionnons leurs usines plus tard à cause de la quantité de glace.»

Navires plus propres

Les nouveaux laquiers permettront aussi à CSL d'utiliser du carburant à moindre teneur en soufre. La combustion de carburant contenant du soufre contribue aux brouillards de pollution et aux pluies acides. En 2020, tous les bateaux circulant sur les Grands Lacs et le Saint-Laurent seront tenus d'utiliser du carburant contenant moins de 0,1% de soufre. La moyenne de la flotte de CSL s'élevait à 1,5% en 2012, selon un rapport publié par la firme l'an passé.

Construits en Chine

Construits en Chine, les laquiers ont réalisé un périple pour venir à Montréal. Ces bateaux conçus pour naviguer sur le Saint-Laurent ont été renforcés pour affronter la traversée de l'océan Pacifique. Les laquiers ont navigué en suivant la latitude de l'Équateur, car «les tempêtes y sont plus rares», précise M. Martel. Puis, ils ont rallié le canal de Panamá en longeant la côte. Une fois parvenus à Montréal, les bateaux ont été délestés des plaques d'acier qui les avaient sécurisés durant ce qui restera le plus long voyage de leur existence.

L'embellie du grain

Cette année, l'embellie du transport de grain pourrait compenser le ralentissement des exportations de fer, dû à la baisse du prix du minerai sur le marché international, affirme Louis Martel. «Nous sommes beaucoup plus influencés par la globalisation et par la variation mondiale des prix qu'il y a quelques années.»

L'enjeu des brise-glace

Au milieu du mois de mars, la Garde côtière canadienne faisait état des pires conditions de glace depuis 20 ans. Deux brise-glace et un aéroglisseur avaient alors été envoyés sur la voie maritime pour aider au déplacement de convois de navires. Le commissaire adjoint, Mario Pelletier, avait aussi reconnu que la flotte de la Garde côtière était vieillissante.