Quand les marchés financiers deviennent volatils et que les pertes s'accumulent, on découvre si on avait bien évalué sa tolérance au risque. Avions-nous trop misé sur l'aspect croissance et pas assez sur l'aspect valeur? Soudainement, est-ce que la volatilité nous fait perdre le sommeil? Que faire?

CROISSANCE...

En fonction du profil de l'investisseur et de sa tolérance au risque, les conseillers et les gestionnaires suggèrent de détenir des titres axés sur la croissance ou sur la valeur. Le titre croissance est celui pour lequel on peut espérer une augmentation importante du capital, mais qui verse peu ou pas de dividende et dont l'évaluation boursière (rapport cours/bénéfice) est relativement élevée. Les titres croissance sont pour les investisseurs qui recherchent l'appréciation du capital. Mais ils peuvent être soumis à des fluctuations boursières importantes et nécessitent une tolérance au risque assez élevée.

... OU VALEUR

Le titre valeur est celui de la société bien établie qui montre déjà des chiffres de ventes et de bénéfices intéressants et qui verse un bon dividende. Ces titres se négocient à un multiple cours/bénéfice raisonnable, inférieur à ceux des titres croissance, et, en règle générale, leurs fluctuations boursières sont moins importantes que celles des titres croissance. Les titres valeur conviennent bien aux investisseurs plus frileux qui misent autant sinon plus sur les revenus générés (dividendes) que sur l'appréciation du capital.

QUAND LA RÉALITÉ FRAPPE

Il est fréquent que les investisseurs surestiment leur tolérance au risque lorsque nous venons de vivre cinq ou six ans durant lesquels les Bourses ont produit des rendements positifs chaque année, explique Philippe Hynes, président de Tonus Capital, une société de gestion de portefeuilles de Montréal. « On oublie que ça peut descendre », dit-il. Les années faciles amènent souvent les investisseurs à déroger de leur plan. Ils en viennent à croire qu'ils possèdent une tolérance au risque plus élevée. Or, quand les marchés baissent, comme ce fut le cas cette année au Canada, la réalité les rattrape.

COMMENT RÉAGIR

Le pire ennemi de l'investisseur, c'est l'émotion, explique Guy Côté, gestionnaire de portefeuilles à la Financière Banque Nationale. « Il faut donc avoir une stratégie toute prête pour affronter les moments difficiles, et la clé sera le rebalancement », dit-il. Après une baisse importante, cela consiste à ramener son portefeuille à sa pondération originale en rachetant les secteurs ou les titres que l'on possède qui ont le plus baissé. « Ce n'est pas subjectif, mais au contraire très cartésien, et cette pratique du rebalancement permet d'éviter d'agir sous le coup de l'émotion », dit M. Côté.

L'IMPORTANCE DU PLAN

Une équipe de hockey ne peut pas changer son style du jour au lendemain, parlez-en à Michel Therrien, ironise Daniel Chartier, gestionnaire de portefeuilles chez Valeurs mobilières Desjardins. C'est la même chose pour le portefeuille de placements. D'offensif (croissance), vous ne pouvez pas devenir défensif (valeur) instantanément. Il faut établir votre recette idéale, et la suivre malgré les aléas qui ne manqueront pas de se présenter. « L'investisseur doit se donner un code de fonctionnement avec son gestionnaire, utiliser des outils avec lesquels il se sent à l'aise, et accepter les conséquences », dit M. Chartier.

L'HORIZON DE PLACEMENT

La plupart des conseillers et des gestionnaires s'entendent sur une chose. Pour bien réussir avec un portefeuille d'actions, l'horizon de temps doit être d'au moins cinq ans. Cela permet de mieux gérer ses émotions, mais surtout de profiter des occasions qui ne manqueront pas de se présenter. « C'est lorsque les marchés sont en baisse que la valeur se crée », rappelle Philippe Hynes. « Ce sera durant ces moments de grande anxiété sur les marchés que les meilleures occasions se présenteront », ajoute-t-il. Mais pour en profiter, l'investisseur doit s'assurer qu'il n'aura pas besoin de retirer son capital à court terme.

UN BON ÉQUILIBRE

Audacieux ou défensif ? Croissance ou valeur ? « Pour bien équilibrer le risque à long terme, il faut un mélange des deux styles d'investissement, car ils se complètent bien », dit Guy Côté. Le risque réside souvent dans une trop grande concentration de style, ajoute Daniel Chartier. « Il faut faire attention à la mode du moment, et plutôt rechercher la recette adéquate », dit-il. Et assurez-vous d'avoir une bonne discipline, insiste Philippe Hynes. « Il faut acheter en fonction d'un objectif, et encaisser ses profits le moment venu, même s'il est souvent difficile de se défaire d'un titre gagnant », dit-il.

Photo François Roy, Archives La Presse

« Ce n’est pas subjectif, mais au contraire très cartésien, et cette pratique du rebalancement permet d’éviter d’agir sous le coup de l’émotion », dit Guy Côté, de la Financière Banque Nationale.