On dit souvent que les talents permettent aux organisations de se démarquer. Plusieurs patrons tardent toutefois à embaucher un responsable des ressources humaines. Quand est-ce le bon moment?

Vous avez eu une idée géniale, vous avez démarré votre entreprise, vous avez embauché une personne, puis une autre, puis une autre. Rapidement, vous réalisez que vous ne pouvez plus vous concentrer sur votre force. Vous gérez constamment des questions d'embauche, de normes du travail, de santé et sécurité, d'augmentations salariales, de conflits. Pour Florent Francoeur, président de l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés (CRHA), ces indices vous indiquent qu'il est temps de trouver une expertise en ressources humaines.

Les esprits cartésiens aimeront la formule : «Dans les pays industrialisés, la règle dit qu'on a besoin d'une personne aux ressources humaines par 100 employés, dit M. Francoeur. D'ailleurs, au Québec, on a environ 40 000 personnes qui travaillent aux ressources humaines pour 4 millions de travailleurs.»

Il faut toutefois adapter la formule à son environnement. «Si l'organisation est peu complexe avec 250 employés qui font sensiblement le même travail, c'est plus facile à gérer que 75 professionnels avec différentes expertises recherchées», explique Alain Gosselin, spécialiste de la gestion stratégique des ressources humaines à HEC Montréal. «Si on vend de l'expertise, on a avantage à s'équiper en gestion des ressources humaines, car c'est le nerf de la guerre. Il n'y a pas de chiffre magique.»

Diane Bazire, CRHA, conseillère d'affaires en ressources humaines chez BDC Consultation, croit que dans l'environnement de travail complexe actuel, l'idéal est d'avoir l'appui d'un spécialiste dès qu'on atteint une dizaine d'employés. «Les descriptions de poste sont maintenant très variées, les employés ont accès à différents types d'avantages, à des mesures de conciliation travail-famille; quelqu'un doit assurer la gestion de ces éléments», affirme-t-elle.

Lois et présence syndicale

L'entreprise doit aussi savoir naviguer dans l'environnement législatif. «Au Québec, on a davantage de lois qu'ailleurs pour encadrer le monde du travail et cela complexifie la gestion des ressources humaines, indique Florent Francoeur. Par exemple, en matière d'équité salariale, les règles sont différentes pour les entreprises de 10 employés et plus, de 50 et de 100.»

L'arrivée d'un syndicat change aussi la donne pour l'employeur. «L'arrivée d'un syndicat est d'ailleurs souvent signe que le patron a tardé à embaucher un spécialiste des ressources humaines, remarque Alain Gosselin. Si les gens sont rémunérés de façon inéquitable par exemple, cela crée rapidement du mécontentement.»

Trouver la bonne formule

Plusieurs formules sont possibles pour répondre aux besoins de gestion des ressources humaines, comme le temps partiel. «Idéalement, il faut chercher une expertise pour mettre en place la structure : politique d'embauche, gestion du rendement, guide des employés, affirme Diane Bazire. On favorise une personne expérimentée qu'on peut embaucher comme consultant.»

Alain Gosselin propose d'allier jeunesse et expérience. Il constate que plusieurs professionnels souhaitent s'investir dans une entreprise à temps partiel à leur compte après une longue carrière. L'équipe prendra ensuite de l'expansion avec l'arrivée de nouveaux besoins.

D'après les spécialistes interviewés, se doter d'expertise en ressources humaines est un investissement.

"Cela influence directement les profits, affirme Mme Bazire. L'entreprise qui embauche la mauvaise personne qui restera trois mois dépensera jusqu'à deux fois et demie le salaire annuel de cette personne en perte de temps et en formation."