Les entreprises québécoises dépensent sept milliards pas année pour s'acquitter des formalités administratives imposées par les différents ordres de gouvernement.

«Autant d'argent parti non pas en fumée, mais en papier», ironise la vice-présidente, Québec, de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI), Martine Hébert.

Son organisme a fait de la paperasserie administrative son cheval de bataille. C'est lui qui en a calculé les coûts pour les entreprises de la province.

Du temps et de l'argent

Ces chiffres sont éloquents. Tous ces milliards sont investis annuellement pour répondre à 557 formalités de toutes sortes requises par les ministères, les organismes gouvernementaux et les municipalités.

«Tout ça prend du temps, et le temps, c'est de l'argent, dit Mme Hébert. Il faut parfois envoyer la même information à 5, 10, voire 20 organismes différents. Il y aurait sûrement moyen de centraliser.»

Au Canada, les pertes en argent liées à la paperasserie équivaudraient à 1,9% du produit intérieur brut, dit la FCEI.

Selon le gouvernement fédéral, 70% des propriétaires d'entreprises considèrent la paperasse comme une source importante de stress dans leur vie. Les deux tiers affirment qu'elle réduit considérablement leur productivité.

«Et plus l'entreprise est petite, pire c'est», constate Martine Hébert.

Pourquoi? «Les PME n'ont pas toujours les ressources pour remplir tous ces formulaires. Elles doivent embaucher du personnel ou sous-traiter. Parfois même acheter de l'équipement», explique-t-elle.

La FCEI a calculé que les entreprises de moins de cinq employés dépensent annuellement 6500$ par employé en formalités, alors que celles de plus de 100 employés allongent 1100$ par tête.

Vent de changement

Depuis quelques années, les entrepreneurs exercent beaucoup de pressions pour que la montagne de paperasserie qui leur est imposée soit réduite.

Les gouvernements provincial et fédéral ont récemment répondu à leurs appels.

Ottawa a mis sur pied en janvier une Commission sur la réduction de la paperasse, dont le rôle était de «trouver des solutions efficaces et permanentes pour réduire les formalités administratives que les petites et moyennes entreprises canadiennes doivent respecter».

Depuis, la commission a reçu 2 300 commentaires d'entrepreneurs sur les difficultés que leur pose la paperasse.

Au banc des accusés: les processus de déclaration (TVH/TPS), qui sont perçus comme étant encombrants, onéreux et complexes.

Manque de souplesse

Le manque de souplesse dans la gestion des versements tardifs et des amendes est aussi montré du doigt, tout comme le temps passé à remplir des sondages obligatoires ou le manque d'accessibilité des personnes-ressources du gouvernement, entre autres.

«Ces irritants, surtout lorsqu'ils sont combinés avec les processus bureaucratiques et les règlements associés à d'autres programmes et à d'autres politiques, sont perçus comme ayant des répercussions directes et souvent négatives sur des éléments clés que les petites entreprises doivent maîtriser pour innover et être compétitives», lit-on dans le rapport préliminaire publié en septembre par la Commission.

En réponse aux entrepreneurs, Ottawa a demandé aux organismes de réglementation d'examiner les effets de leurs exigences sur les PME afin «qu'elles n'aient pas d'incidences involontaires sur celles-ci et qu'elles soient administrées de la manière la plus équitable et la plus efficiente possible».

Une campagne publicitaire pour guider les petites entreprises vers la bonne information sur les programmes et les règlements fédéraux est aussi dans les cartons.

«Au moins, il y a une volonté politique, dit Martine Hébert. Maintenant, il faut trouver comment faire pour améliorer la situation.»

C'est dans cette optique que Québec a fondé, en janvier, le Groupe de travail sur la simplification réglementaire et administrative, auquel siège la FCEI. Un rapport est prévu pour l'automne.

«La réglementation est nécessaire afin d'assurer la protection du public et de l'environnement, mais notre gouvernement désire mettre en place des conditions permettant de bâtir un contexte d'affaires encore plus compétitif», avait alors promis le ministre Sam Hamad.

Le ministre avait ajouté qu'une attention particulière serait portée aux PME, davantage touchées par la problématique.

Réduction de 20%

Dans son dernier budget, le gouvernement Charest s'est engagé à réduire de 20% le fardeau imposé aux entreprises par les formalités administratives. Selon la FCEI, ce chiffre n'est pas encore atteint.

«Dans un monde idéal, on réduirait la paperasse de moitié, avance Mme Hébert. Mais si on arrive à faire 20%, ce sera déjà ça... Ce n'est pas un problème qui est simple à régler. Il y a tellement de paliers et d'organismes! Ce qu'il faut, c'est penser à intégrer dès qu'une nouvelle réglementation est adoptée. On veut plus de cohésion.»