Les bonnes idées peuvent pousser n'importe où dans l'entreprise, à condition d'être cultivées.

L'innovation est partout chez Portes Lemieux. Ne cherchez pas le président de l'entreprise dans son usine de Windsor qui fabrique des portes sur mesure.

Bernard Gervais passe son temps à récolter des idées en voyageant partout dans le monde.

Pendant ce temps, les employés ne l'attendent pas pour innover.

Ils forment régulièrement des ateliers kaizen, ces travaux en équipe ciblés sur une problématique. À la fin de la session, ils présentent leurs propositions à la direction, qui décide en fonction du plan stratégique de l'entreprise et d'un retour sur l'investissement de 12 mois maximum.

Des économies

Cette année, Portes Lemieux a fermé une chaîne d'usinage. Les produits ont été regroupés sur une autre chaîne de production, générant une économie de 100 000$.

«C'est la matière grise des employés qui a imaginé ça», précise Mario Aubé, directeur général.

L'entreprise a aussi conçu son propre logiciel de cotation, automatisant la réalisation des dessins.

Le grossiste choisit les caractéristiques de la porte sur l'internet. Le prix se met à jour en temps réel.

Le client reçoit le dessin en moins de 10 minutes. «C'est l'entreprise qui répond le plus vite qui obtient la commande», explique M. Aubé.

Portes Lemieux arrive ainsi à surmonter les difficultés, malgré de récentes mises à pied.

Les ventes aux Américains, auxquels l'entreprise de l'Estrie vend neuf portes sur dix, ont chuté de 30% durant l'été.

Quant aux gros volumes, ils sont accaparés par les manufacturiers asiatiques et sud-américains.

Mais ces derniers ne peuvent pas rivaliser sur le marché sur mesure. «En Chine, les fabricants de portes sont plus réticents à innover. On a 10 ans d'avance sur la machinerie et sur les procédés», observe Mario Aubé.

Rapidité

La rapidité est devenue un critère décisif sur les marchés.

«Nous sommes dans un contexte d'accélération technologique et de sophistication de la demande, explique Laurent Simon, professeur en management de l'innovation à HEC Montréal. Si une entreprise n'est pas capable de répondre à cette réalité, elle est menacée.»

Et ce n'est pas en innovant de temps en temps qu'une firme peut rester à la pointe. «Une entreprise doit être capable d'innover de manière routinière», lance le professeur.

Or, la créativité permanente doit reposer sur la participation de salariés convaincus des valeurs véhiculées par l'entreprise.

«Regardez les entreprises qui ont une culture de l'innovation, leurs employés ont le sentiment de participer à une oeuvre collective, avec une finalité inspirante», explique-t-il, en citant Google et Facebook qui se donnent une mission de révolution démocratique par l'informatique.

Le rôle de la hiérarchie en est alors bouleversé. «Dans une entreprise innovante, le patron n'arrive plus en réunion avec son agenda, constate Laurent Simon. Il présente les enjeux et le contexte, avant de faire appel à l'expertise de chacun.»

Pour en arriver là, l'entreprise doit donner la parole à tous. «L'enjeu est de réenchanter les relations dans les entreprises», assure Isabelle Mahy, professeure au département de communication sociale et publique de l'UQAM.

Cette ouverture à la participation de tous pourra insuffler une confiance nécessaire à la proposition d'idées nouvelles.

La professeure préconise également l'intervention d'experts en créativité au sein des entreprises: les artistes.

«L'innovation c'est leur métier, souligne Mme Mahy. Leurs modes de travail collaboratifs permettent d'imaginer ce qu'on n'a jamais cru être possible.»

La chercheuse sera au symposium international «Médiation artistique et innovation managériale» qui aura lieu les 5 et 6 décembre à l'UQAM.