Pierre Boivin est président et chef de la direction de Claridge.

«Il y a quatre ou cinq éléments fondamentaux pour réussir sur les marchés mondiaux, constate Pierre Boivin, et le défi est qu'il faut être bon sur tous les plans.»

Un pas à la fois: commençons par les énumérer.

1. Ouvrir des marchés, s'ouvrir à leur culture

Le succès sur les marchés internationaux est d'abord une question de philosophie et de culture.

«Il faut vraiment que l'entrepreneur et son entreprise développent et nourrissent une culture ouverte sur la diversité, une culture de curiosité, explique Pierre Boivin. Et ça déborde de loin la langue.»

Il ne suffit pas que l'entreprise compte quatre ou cinq locuteurs de langues étrangères. «Il s'agit de passer la barrière linguistique et d'être capable de comprendre et d'intégrer la culture de ces pays dans lesquels on veut réussir.»

Les entreprises québécoises ont toutefois un atout: un bassin de cultures et de nationalités très diversifiées.

«Et d'un autre côté, ajoute-t-il, il faut aussi que les entreprises réussissent à exporter leur culture dans les pays où elles veulent s'installer.»

Cette communication à deux sens ne s'installe qu'avec une grande ouverture et une réelle sensibilité à la culture de l'interlocuteur.

2. L'intelligence d'affaires

«Il n'est pas suffisant d'avoir un produit innovant, prévient-il. Il faut vraiment bien comprendre le marché pour être capable de développer des stratégies percutantes.»

C'est ce qu'il appelle «l'intelligence d'affaires».

Cette compréhension se construit d'abord avec le développement du réseau. «C'est hyper important. Ça implique un engagement important de la part de l'entreprise, généralement de son PDG.»

Les outils sont nombreux: foires, expositions, conférences internationales... Mais ces contacts peuvent également être établis par l'intermédiaire des firmes de professionnels. «Les cinq grandes firmes de comptables à Montréal sont installées dans tous les pays du monde», donne-t-il en exemple.

Le choix des partenaires financiers, investisseurs ou membres du conseil d'administration tiendra aussi une place essentielle lors des premiers pas sur les marchés étrangers.

«Souvent, les PME ne sont pas bien entourées en termes d'investisseurs ou de conseillers, observe Pierre Boivin. Les entrepreneurs qui réussissent ont réalisé très tôt qu'il est avantageux de s'entourer d'actionnaires qui comprennent leur secteur d'activités et qui ont de l'expérience dans les marchés internationaux. Tu peux ainsi accélérer ton développement et la création de ton réseau à l'international, et tu évites certaines erreurs de débutant.»

3. Assurer ses bases

«Enrichir les structures au bon moment, avec un directeur financier et un directeur des opérations, est fondamental pour permettre à l'entreprise de prendre son élan à l'international», avise encore Pierre Boivin.

Le président de l'entreprise sera habituellement le fer de lance de l'offensive internationale. Il y consacrera une large part de son temps et de son attention.

«Pendant ce temps, il faut que l'entreprise continue d'exploiter son premier marché, de façon rentable et efficace, poursuit M. Boivin. La plupart des entrepreneurs comprennent assez tôt l'importance d'un directeur financier. Mais il y en a trop qui tardent à s'adjoindre un bon second au plan opérationnel.»

4. L'utilité des partenariats

Comment s'implanter dans un marché étranger?

«Le modèle le plus économique est de commencer avec des agents, que l'on paie à commission.»

L'agent manufacturier représente cependant plusieurs clients en même temps, il ne maîtrise pas la culture de l'entreprise et il a sans doute conscience de n'être qu'un intermédiaire temporaire.

«Si on pense que le marché est suffisamment porteur pour une filiale, pourquoi ne pas mettre en place un partenariat?»

Un partenariat permet d'établir des relations étroites avec un entrepreneur local. Il connaît son marché et ses intérêts convergent avec les nôtres parce qu'il a lui aussi investi dans l'aventure.

Encore faut-il bien le choisir. «Il faut vraiment faire ses devoirs. On en revient au réseau, à ses actionnaires, au membre de son conseil d'administration.»

5. La créativité

«Les entreprises qui veulent réussir doivent avoir une forte culture de créativité», insiste Pierre Boivin.

«La créativité n'est pas un point d'arrivée. C'est un état d'esprit qui mène à l'innovation, c'est un questionnement constant qui mène au dépassement de soi. Si ton entreprise est vraiment imbibée d'une culture de créativité, tu vas être innovant et tu vas être performant.»

La culture de la créativité s'instaure par le haut. «Mais elle doit être rapidement adoptée et vécue par la base.»

En quoi la créativité est-elle utile sur les marchés étrangers? «Si tu as une culture ouverte sur la diversité, et par définition créative et curieuse, tu vas trouver, la plupart du temps, la bonne solution ou la bonne approche dans chaque marché.»