Après la crise de 2008, la valeur du dollar canadien a crû jusqu'à la parité avec le dollar américain, mais elle ne cesse de perdre de l'altitude depuis 2014. Si vous réalisez une grande part de vos activités d'affaires aux États-Unis, l'impact, qu'il soit positif ou négatif, est important. Il existe des stratégies pour se protéger des fluctuations.

ÉVALUER L'IMPACT

Si vous importez énormément de marchandise américaine et que le dollar canadien perd 30 % de sa valeur, vous risquez de perdre votre compétitivité. Au contraire, si vos ventes se font principalement aux États-Unis, vous êtes gagnant. Mais si le dollar remontait soudainement, demeureriez-vous concurrentiel ?

« La plupart des PME évoluent sans trop s'arrêter à ces questions et gèrent la situation lorsqu'elles sont confrontées à un enjeu », constate Simon Gaudreault, directeur des affaires économiques, Québec, pour la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI).

Il conseille toutefois d'évaluer son exposition aux fluctuations du taux de change et de mettre en place une stratégie pertinente pour en réduire les impacts.

DIMINUER LES OPÉRATIONS DE CHANGE

Lorsque le taux de change n'est pas à son avantage, on peut envisager d'éliminer le plus possible les conversions de devises. Cela peut se faire en ouvrant un compte étranger.

« Par exemple, vous pouvez garder les montants de vos ventes en devises étrangères pour payer vos fournisseurs de ce pays avec ces sommes, explique Simon Gaudreault. On appelle cette stratégie la couverture naturelle : on utilise la trésorerie pour éliminer des opérations de change. »

GARDER UNE MARGE DE MANOEUVRE

Des prévisions très prudentes sont aussi une forme de protection.

« Si une entreprise exportatrice fait ses prévisions en considérant le dollar canadien à 75 cents US, elle risque de s'habituer à l'avantage que lui procure la faiblesse du dollar canadien, affirme Simon Gaudreault. Une gestion plus prudente serait de faire ses prévisions avec un dollar plus fort. »

Ainsi, si le dollar canadien demeure faible, l'entreprise réalisera une plus grande marge de profit, mais s'il s'apprécie, elle continuera à générer des profits même si sa marge sera diminuée.

Bien sûr, il faut toujours réévaluer et ajuster au besoin sa stratégie. Parce que les paramètres d'une gestion prudente ne sont pas nécessairement les mêmes maintenant qu'ils le seront dans un an.

SIGNER DES ENTENTES AVEC SES CLIENTS

BioVac System produit des robots télécommandés pour le nettoyage et la décontamination de conduits de ventilation. La PME s'approvisionne et assemble ses produits au Québec, mais réalise environ 55 % de son chiffre d'affaires à l'étranger. Pour se protéger des fluctuations du taux de change, l'entreprise signe des ententes avec ses clients.

« Elles mentionnent que le prix sera ajusté si le taux de change fluctue à plus de 10 % et précisent un volume d'achat minimum pour l'année afin d'éviter qu'en fonction du taux de change, les clients achètent beaucoup plus ou beaucoup moins », explique David McDougall, de BioVac System, une PME de 25 employés.

Dans ce marché spécialisé, il précise que cette pratique est courante et bien acceptée.

SIGNER DES CONTRATS DE CHANGE AVEC SA BANQUE

L'entreprise exportatrice A. Lacroix Granit, qui fournit l'industrie de la construction commerciale et institutionnelle, réalise près de 70 % de son chiffre d'affaires aux États-Unis. Depuis quelques années, elle signe des contrats de change avec son institution financière pour s'assurer d'un taux afin de protéger sa marge bénéficiaire.

« On sait toujours combien on aura besoin de changer d'argent chaque mois pour payer nos dépenses canadiennes, et je couvre environ 60 % de ce montant par les contrats de change », explique Dominique Lacroix, vice-présidente administration.

Pour le reste des sommes à changer, l'entreprise va de l'avant lorsque le taux du jour est avantageux.

ATTENTION À LA DIVERSIFICATION DES MARCHÉS

Vous envisagez de développer d'autres marchés, en Europe par exemple, pour venir compenser les fluctuations du taux de change entre les dollars canadien et américain ?

« Il faut être prudent avec cette stratégie », prévient Simon Gaudreault.

D'abord, parce que ce n'est habituellement pas la meilleure raison pour une entreprise de conquérir un nouveau marché. Puis, rien n'assure que ce nouveau marché viendra vraiment contrebalancer l'autre.

« Les experts disent souvent, en fait, que la diversification des marchés pour une PME vient augmenter ses risques liés aux fluctuations des taux de change plutôt que de les diminuer », ajoute-t-il.