Le pont Samuel-De Champlain, porte d'entrée sur Montréal. On le voulait emblématique. On le voulait aussi très rapidement. Un projet presque terminé aux défis multiples racontés par Guy Mailhot, ingénieur en chef du pont Samuel-De Champlain à Infrastructure Canada.

Mise en service du pont Samuel-De Champlain en janvier 2021 : c'était l'échéancier prévu en 2012. Mais, en 2013, trois ans ont été soustraits de l'échéancier en raison de l'état de détérioration du pont à remplacer, qui est le plus fréquenté du Canada avec le passage de près de 50 millions de véhicules chaque année.

Toutes les étapes ont été accélérées, à commencer par le travail préparatoire au lancement de l'appel d'offres afin de trouver le partenaire privé pour la construction.

« Nous n'avions pas le temps de lancer un concours international d'architecture, alors nous avons créé un comité pour brainstormer. », explique Guy Mailhot, ingénieur en chef du pont Samuel-De Champlain à Infrastructure Canada.

Infrastructure Canada et Arup, une firme d'experts-conseils en ingénierie, sont allés chercher l'architecte Poul Ove Jensen de la firme danoise Dissing+Weitling, à qui on doit plus de 200 ponts dans le monde, dont le Stonecutters de Hong Kong. La firme d'architecture montréalaise Provencher Roy est aussi venue grossir les rangs de l'équipe.

Pour assurer les intérêts de la communauté, la Ville de Montréal, Mission Design, Héritage Montréal ainsi que l'Ordre des ingénieurs et l'Ordre des architectes du Québec ont également ajouté leur grain de sel.

Le concept choisi : un pont ressemblant à une autoroute suspendue sur l'eau avec une seule partie haubanée.

Un pont durable

La durée de vie imposée pour les composants non remplaçables du pont, comme ses éléments de fondation, ses infrastructures, son pylône principal et sa superstructure, est de 125 ans.

« Le code standard des ponts au Canada prévoit une durée de vie de 75 ans, donc il a fallu prescrire des exigences particulières dans le document d'appel d'offres », indique Guy Mailhot.

Cela comprend de l'acier inoxydable pour l'ensemble de la dalle de tablier et plusieurs autres composants stratégiques, différents types de bétons performants, notamment pour résister au sel, une membrane d'étanchéité, un système de drainage efficace et des exigences pour assurer un bon entretien de l'ouvrage.

8 : nombre de joints de dilatation du nouveau pont, contre 57 sur l'ancien, une réduction qui vise à limiter les risques d'infiltration d'eau.

« La capacité de mouvement de chaque joint avec le chaud et le froid a été augmentée pour atteindre environ 60 cm, précise l'ingénieur en chef. Ce système permettra au pont de traverser les grands écarts de température montréalais. »

Le pont devait également être conçu pour résister à des vents exceptionnels - allant jusqu'à 175 km/h - et à des séismes de forte intensité pour servir de pont de secours.

Un contexte difficile

Comme le pont est en milieu urbain dense, le constructeur devait pouvoir travailler dans peu d'espace en maintenant le plus possible la circulation. Les exigences environnementales étaient aussi nombreuses, avec notamment des niveaux de bruit, de qualité de l'air et de matière en suspension dans l'eau à respecter. On demandait d'aller chercher la certification pour l'environnement et les communautés ENVISION de niveau bronze.

L'appel d'offres a été lancé en 2014 et accordé en juin 2015 au consortium Signature sur le Saint-Laurent composé de SNC-Lavalin, ACS et HOCHTIEF. Les travaux ont commencé dès l'été 2015.

« En même temps que les premiers travaux se faisaient sur le site, le consortium réalisait la conception finale des autres éléments du pont et nous devions faire le travail d'approbation. », dit Guy Mailhot.

Le pont n'a finalement pas pu être livré le 1er décembre 2018. Il doit l'être au plus tard en juin.

Plusieurs instruments ont été intégrés dans la structure pour suivre de près les déformations, la corrosion, les mouvements de dilatation, etc.

Des projets de compensation écologique pour la construction du pont, soit la restauration du marais de l'île Lapierre, le réaménagement des frayères des rapides de Vaudreuil et l'installation de brise-lames sur les îles de la Paix pour les protéger de l'érosion, seront achevés prochainement. Les investissements atteignent 20 millions de dollars.

Le niveau le plus élevé de certification ENVISION - platine - a finalement été accordé au pont Samuel-De Champlain, une première au Canada pour un pont.

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Guy Mailhot, ingénieur en chef du pont Samuel-De Champlain à Infrastructure Canada.