L'Ordre des ingénieurs du Québec fait appel au Bureau de normalisation du Québec (BNQ) pour l'épauler dans sa nouvelle certification éthique des firmes de génie-conseil. Le BNQ rédigera un cahier des charges qui constituera la base des exigences de la certification.

Le Bureau de normalisation siégera au comité mixte mis sur pied par l'Ordre des ingénieurs. Les autres membres du comité seront des représentants d'organismes publics indépendants, à confirmer dans les prochaines semaines. «Je peux vous dire que la crédibilité et la notoriété vont être là», assure le président de l'Ordre, Daniel Lebel.

Viser les firmes plutôt que les ingénieurs

Les audits débuteront au printemps 2014 et viseront surtout les firmes de génie-conseil, qui traversent une crise sans précédent depuis le début de la commission Charbonneau.

«Les ingénieurs sont en contact avec toutes sortes de gens qui pourraient essayer de les influencer pour obtenir les contrats, déplore le directeur du Bureau de normalisation, Jean Rousseau. On va faire en sorte d'établir ce à quoi on s'attend et ce qu'on doit éviter, comme les conflits ou apparences de conflits d'intérêts. On va exiger des actions et une démonstration que des actions ont été prises pour contrer tout ça.»

La réglementation de l'Ordre, avec son Code de déontologie, se limitait auparavant aux seuls ingénieurs. L'Ordre de 60 000 membres veut maintenant s'assurer que les employeurs aient les mêmes bases. «On va parler de la validation du code d'éthique et de conduite, et évaluer comment l'ingénieur peut s'y retrouver», résume le président.

En septembre dernier, l'Ordre des ingénieurs a dû déposer 20 plaintes disciplinaires contre 5 ingénieurs ayant trempé dans des activités de corruption ou de collusion.

«La pratique du génie pur n'est pas remise en cause, ajoute M. Lebel. Le génie québécois est reconnu mondialement et a servi à bâtir le Québec d'aujourd'hui. Maintenant, la pratique dont on a entendu parler à la commission Charbonneau nous démontre que l'on doit mettre en place ce cadre-là pour éviter de revivre une telle situation.»

Trouver des firmesvolontaires

C'est sur une base volontaire que les entreprises ouvriront leurs livres, tout en couvrant elles-mêmes le coût de l'audit. En recourant au principe de l'utilisateur-payeur, l'Ordre évite que ses membres assument les coûts du programme. On ignore encore à combien se chiffrera l'opération.

Le président de l'Ordre des ingénieurs ne craint toutefois pas de manquer d'entreprises candidates, malgré les frais qu'elles auront à assumer. «Il s'agit d'un outil pour bien faire les choses, soutient M. Lebel. Ce serait une erreur de ne pas le faire, surtout avec ce qu'on a entendu à la commission Charbonneau!»

L'Ordre et le BNQ analysent déjà le cadre de conduite d'un échantillon de cinq à dix firmes qui ont bien voulu se prêter à l'exercice.

À la fin des travaux du comité, en avril 2014, de trois à cinq autres firmes seront sélectionnées pour les premiers audits. Si tout va bien, les audits s'étendront ensuite à toutes les entreprises intéressées.

«Il y a perte de confiance du public envers la profession, déplore Daniel Lebel. On est en train d'oublier ce qu'elle a d'important au jour le jour pour la société. C'est un problème majeur! Il faut regagner cette confiance. On va tout faire pour y parvenir, parce que les professionnels au quotidien travaillent en général de façon exemplaire.»