Un taux de chômage d'à peine 3% pour l'ensemble de la profession. Une majorité d'étudiants assurés d'un emploi avant même d'avoir obtenu leur diplôme. Des milliers de places de stage qui demeurent vacantes faute de candidats. Le secteur du génie québécois est en ébullition comme il ne l'a sans doute jamais été. Et rien ne laisse présager une accalmie à court terme. Bref, les perspectives d'avenir y sont excellentes.

«La mauvaise nouvelle, c'est qu'il n'y a pas assez d'étudiants pour pourvoir les postes. Il y a pénurie de candidats dans tous les programmes. Les entreprises se font la lutte entre elles pour être capables d'attirer les meilleurs. Juste ici au Québec, des projets comme le CHUM, le pont Champlain et l'échangeur Turcot vont mobiliser le secteur du génie de la construction pour les 10 prochaines années», explique Pierre Rivet, directeur au Service de l'enseignement coopératif à l'École de technologie supérieure (ÉTS) de Montréal.

Il cite également en exemple le cas du génie logiciel et des technologies de l'information, un domaine en pleine croissance, notamment grâce à l'internet, aux nombreuses plateformes de communication et à la production de jeux vidéo.

L'an dernier, au Québec seulement, les 450 étudiants du secteur inscrits à l'ÉTS avaient le choix parmi 1600 stages. Et pour les 120 finissants, 600 postes étaient offerts. En génie électrique et en génie mécanique, le ratio stages/étudiants était de trois pour un.

«Le génie a un très grand avenir devant lui, ne serait-ce que par les besoins du Québec et du Canada. Les volets transports et infrastructures vont continuer à croître. En aéronautique, Montréal est la troisième ville d'importance dans le monde, derrière Toulouse et Seattle. La demande y est très forte. C'est sans parler des besoins du secteur de la santé dans un contexte de société vieillissante. Mais il y aussi de l'avenir ailleurs, car l'expertise canadienne est reconnue partout dans le monde», explique Christophe Guy, directeur général de Polytechnique Montréal.

Innovation

Le déplacement de la fabrication vers l'Asie ou d'autres régions de la planète touche-t-il certains secteurs du génie? «Cela fait tout simplement en sorte que l'innovation est un incontournable au Québec. Si on veut faire la différence dans le marché, il faut une certaine avance technologique. C'est pourquoi même les plus petites entreprises embauchent des ingénieurs et se tournent vers l'innovation», dit-il.

Ensemble, Polytechnique et l'ÉTS comptent près de 14 000 étudiants, du baccalauréat au doctorat. Leurs programmes de génie touchent les secteurs minier, géologique, civil, mécanique, aérospatial, biomédical, la production automatisée et d'autres opérations logistiques. Autrement dit, il y a du génie dans à peu près tous les secteurs d'activité. Et l'offre, rappelons-le, dépasse largement la demande.

Malgré le contexte actuel de plein emploi et un avenir qui s'annonce prometteur, le génie québécois ne peut s'asseoir sur ses lauriers. À l'instar de notre population, les ingénieurs vieillissent.

«Près de 34% de nos 62 000 membres ont plus de 50 ans. Et la moyenne d'âge dans la profession est de 42,6 ans. On peut donc considérer que dans 10 ans, il va y avoir un trou à combler. Il faut donc gérer la demande actuelle, mais en plus, on doit se préoccuper de la relève», indique Daniel Lebel, président de l'Ordre des ingénieurs du Québec.

L'Ordre dit être «très actif» dans la promotion du génie. Il fait d'ailleurs flèche de tout bois par l'entremise de partenariats dans les écoles secondaires et les cégeps. À la télévision, il est le principal commanditaire de l'émission scientifique Génial à Télé-Québec et diffuse depuis quelques années des publicités dans lesquelles on démystifie le métier d'ingénieur.

Enfin, Daniel Lebel et son équipe travaillent à faciliter la vie des ingénieurs diplômés à l'étranger, mais aussi à mieux les préparer à la réalité québécoise. Ces derniers représentent actuellement 10% des membres de l'Ordre.