L'Institut NéoMed, créé officiellement le 23 novembre dernier, financera 21 projets de recherche dans les cinq prochaines années.

Le but de chaque projet est de créer un nouveau produit pharmaceutique thérapeutique. NéoMed disposera pour cela de 77 millions de dollars.

Bien sûr, tous ces projets n'aboutiront pas. Mais, si quelques-uns se retrouvent éventuellement au chevet des malades, NéoMed aura atteint ses objectifs. «Nous aurons stimulé la recherche universitaire, dit Max Fehlmann, président et chef de la direction de NéoMed. Nous aurons soutenu les PME québécoises qui valident les découvertes des labos de recherche fondamentale et nous aurons donné à nos grands bailleurs de fonds pharmaceutiques un rendement de l'investissement très intéressant.»

NéoMed est actuellement financé par deux grandes sociétés pharmaceutiques internationales, Astra Zeneca et Pfizer.

Astra fournit les locaux de Saint-Laurent où elle faisait de la recherche sur de nouveaux antidouleurs jusqu'en février dernier. Elle a abandonné cette recherche et met gratuitement les locaux, édifices et labos à la disposition de NéoMed.

Astra va plus loin. «La cession de l'édifice équivaut à un don de 29 millions, précise Neil Maresky, vice-président, affaires scientifiques chez Astra. Nous cédons aussi la propriété intellectuelle sur trois composés expérimentaux que nous avons développés à Saint-Laurent, une valeur de 1 million. Et nous garnissons la bourse de NéoMed de 5 millions en espèces.»

Pfizer ajoute à ce viatique 3,5 millions. Le gouvernement du Québec y va d'une subvention de 8 millions et d'un prêt sans intérêt de 20 millions sur cinq ans.

Il restera pour NéoMed à aller chercher une autre tranche de 40 millions. «Nous visons 15 millions provenant du fédéral, calcule Max Fehlmann, et une somme que je ne peux chiffrer en provenance de fondations caritatives. Et puis nous comptons sur 10 millions supplémentaires venant d'autres sociétés pharmaceutiques.»

Tir groupé

Cette approche où les sociétés pharmaceutiques rament ensemble dans un même organisme existe déjà au Québec. C'est le Consortium québécois sur la découverte de médicament (CQDM). Là, Astra, Pfizer, Merck, Boehringer Ingelheim, Lilly et GlaxoSmithKline ont mis leurs billes en commun pour financer des chercheurs québécois.

Il ne s'agissait pas de mettre au point des composés thérapeutiques, mais des outils de découverte qu'on se partageait ensuite.

Avec NéoMed, les sociétés vont plus loin. Elles investissent dans les labos des chercheurs dans l'espoir qu'un nouveau médicament émergera, peut-être deux ou trois. «Nous espérons des revenus éventuels, reconnaît M. Maresky. Mais, que ce soit des revenus sur la vente du produit ou une part des redevances, notre investissement est sur le moyen à long terme.»

Chez Pfizer, même vision de collaboration à court terme et espoir de revenus à long terme. «Dans l'éventualité où au moins une des 21 molécules prouvait son efficacité thérapeutique, affirme Vincent Lamoureux, directeur des communications, on croit qu'il pourrait y avoir une sorte d'enchère entre les sociétés participantes. La molécule et ses revenus iraient au plus offrant.»

Impacts québécois

À Montréal InVivo, grappe des sciences de la vie du Montréal métropolitain, on qualifie la création de l'Institut NéoMed de «très belle nouvelle». Michelle Savoie, directrice générale d'InVivo, affirme que l'Institut est un projet structurant.

«D'abord, on finance de la recherche universitaire québécoise, dit-elle. Ensuite, on fait appel à des PME québécoises spécialisées dans les tests précliniques et cliniques. Ces tests visent à démontrer l'efficacité et la non-toxicité des molécules choisies par NéoMed. Finalement, nous nous assurons d'une présence durable des sociétés pharmaceutiques chez nous.»

InVivo espérait la confirmation de cette présence avec quelque anxiété. Les fermetures successives des labos de Merck, d'Astra et de Boehringer Ingelheim, dans la région de Montréal, ont fait très mal. Les sociétés pharmaceutiques se disaient en réorganisation et assuraient qu'elles reviendraient, leurs dollars, leurs emplois et elles, sous quelque autre forme.

En avril 2012, le groupe pharmaceutique Roche a annoncé qu'il faisait de l'Institut de cardiologie de Montréal son centre international de recherche en cardiologie.

En septembre 2012, c'est Bristol-Myers Squibb qui a financé deux nouveaux projets de recherche en oncologie à l'Institut de recherche en oncologie et immunologie de l'Université de Montréal.

Les 77 millions de NéoMed confirment le retour, sous une forme différente, des investissements pharmaceutiques chez nous.