Le marché de l'immobilier commercial à Québec profite depuis longtemps de l'imposante présence du gouvernement provincial. C'est toutefois la vigueur de l'économie de la région qui a contribué à multiplier les constructions ces dernières années. Cinq mots pour comprendre.

BUREAUX

Quelque 223 000 m2 d'espace de bureaux se sont ajoutés au cours des cinq dernières années à Québec et Lévis. Le taux d'inoccupation est actuellement de 8,7 %. « C'est un taux équilibré, l'offre répond à la demande et le marché est sain, analyse Steven Lavoie, évaluateur agréé et premier directeur principal chez Raymond Chabot Grant Thornton. Dans les dernières années, il se situait entre 5 % et 6 %. C'est ce qui a entraîné beaucoup de construction. » Il s'attend maintenant à ce que le taux d'inoccupation redescende à 7,4 % d'ici 2019.

Quant à l'impact de l'austérité gouvernementale, aucun effet n'est prévu dans le marché immobilier à court terme. « Quand les espaces sont loués, les baux sont à long terme, parfois jusqu'à 15 ou 20 ans, explique M. Lavoie. De plus, la réduction de la taille de l'État se fait beaucoup par attrition, alors ça prend un certain temps. »

PHARE

Doit-on s'inquiéter du projet de construction du Phare, une tour de 65 étages accompagnée de trois autres tours de 25 à 30 étages, par le Groupe Dallaire ? Pourrait-il nuire à la vitalité d'autres secteurs ? « Ce sont des promoteurs sérieux et assez prudents, note M. Lavoie. Leurs prévisions de construction sont sur une période de 10 ans. Je pense qu'ils vont cibler l'absorption naturelle annuelle et aller en chercher une bonne partie. » Il ne prévoit donc pas de déplacements massifs.

Par contre, le secteur Sainte-Foy risque de voir moins de nouveaux projets. 

« Il y a encore beaucoup de terrains dans ce secteur qui pourraient accueillir des immeubles de bureaux. Mais si le Phare décolle, ça va être difficile pour d'autres de lancer des édifices. Il ne doit pas y avoir trop de construction en même temps. »

- Martin De Rico, évaluateur agréé et président de DeRico experts-conseils

PARCS INDUSTRIELS

Les espaces industriels vacants sont une denrée rare à Québec. À peine 7 % des terrains étaient toujours disponibles pour la vente au printemps dernier. Sans surprise, les valeurs sont à la hausse. « Le nouveau rôle d'évaluation a été déposé en septembre et on constate une augmentation de 12,3 % pour l'ensemble des immeubles non résidentiels, explique M. De Rico. Mais la portion qui augmente le plus, c'est celle des immeubles industriels avec 20,2 %. Les terrains coûtent cher et il n'y en a plus beaucoup. »

Selon lui, la Ville de Québec essaie de développer de nouveaux pôles, mais se bute à certains obstacles, comme la protection des milieux humides et des terres agricoles, par exemple. « Changer un zonage, ça peut être long », note-t-il. Actuellement, la ville compte 14 parcs industriels, un parc technologique, deux espaces d'innovation et cinq zones industrielles sur son territoire.

COMMERCES

Comme ailleurs dans la province, Québec a été témoin des turbulences dans le commerce de détail avec la fermeture de plusieurs chaînes de détaillants de vêtements et du géant américain Target. Néanmoins, ses centres commerciaux parviennent à tirer leur épingle du jeu. « Les trois gros centres, soit les Galeries de la Capitale, Laurier Québec et Place Sainte-Foy, se comportent assez bien, estime M. De Rico. Les taux d'occupation sont quand même à près de 94 %. » Un constat que partage M. Lavoie. « Ils parviennent bien à se replacer, note-t-il. Place Sainte-Foy a réussi à relouer pratiquement tout l'espace laissé vacant par le départ des Ailes de la mode. »

Quant aux « power centers », la construction du Carrefour Saint-Romuald, à Lévis, avance rondement. « C'est un secteur qui était mal desservi », note M. De Rico. Il ne s'attend toutefois pas à voir d'autres projets semblables prochainement.

MIXITÉ

La tendance est aussi à la mixité. Ainsi, certains édifices de bureaux ou multirésidentiels prévoient des locaux commerciaux au rez-de-chaussée, par exemple. « On remarque que les loyers nets affichés pour les espaces de bureaux n'ont pas beaucoup monté ces dernières années, explique M. Lavoie. Les constructeurs vont donc y ajouter une partie résidentielle et des basilaires commerciaux parce que ça génère normalement de meilleurs revenus au pied carré. »

Cela s'accompagne d'une plus grande densification résidentielle. « Il y a de gros projets qui s'en viennent comme l'écoquartier d'Estimauville, le quartier militaire derrière Laurier Québec et l'ancien ciné-parc, dans le secteur Saint-Nicolas à Lévis, énumère M. De Rico. Ce sera de minivilles. » 

« Il y a plus de 1400 unités locatives dont la construction est projetée à Québec, précise de son côté M. Lavoie. On note un grand déplacement de la copropriété vers le locatif. »