La grappe montréalaise du secteur aéronautique vient de signer deux ententes internationales stratégiques.

Dans chacun des cas, on ouvre des portes vers de nouveaux clients aux sous-traitants montréalais de l'aéronautique. On vise également à permettre aux grands donneurs d'ordre montréalais d'avoir accès à une plus vaste palette de fournisseurs.

En juillet dernier, dans le cadre du Salon international aéronautique de Farnborough, en Angleterre, la grappe montréalaise a conclu une entente de collaboration avec la Pacific Northwest Aerospace Alliance (PNAA).

Ce réseau est centré à Seattle, tout comme l'avionneur Boeing. C'est en quelque sorte la grappe des fournisseurs de l'avionneur américain.

«Notre accord avec PNAA vise trois buts, précise Suzanne Benoît, présidente-directrice générale d'Aéro Montréal. D'abord, ouvrir l'accès de Boeing à nos fournisseurs montréalais.»

Cela leur permettrait d'avoir un autre client que Bombardier ou Bell Helicopter. Toutes les PME n'en sont pas là, mais celles qui ont su élargir leur offre, notamment sur le plan des produits intégrés, seraient prêtes, à son avis.

«Ensuite, ajoute-t-elle, offrir aux grands fournisseurs de Boeing, présents à Seattle, notre expertise montréalaise.»

Bref, si l'accès direct à Boeing est réservé aux intégrateurs, les entreprises moins avancées peuvent tout de même croître en devenant fournisseurs des grands intégrateurs desservant Boeing. C'est un pas en avant dans la chaîne d'approvisionnement.

«Finalement, selon Mme Benoît, nos donneurs d'ordre montréalais, grâce à l'accord passé avec Seattle, auront un accès plus aisé aux fournisseurs de Boeing. Il ne s'agit pas de faire du maraudage, mais de s'ouvrir des horizons.»

Des intentions claires

Dès les premiers pourparlers avec la PNAA, lors de l'événement Aeromart Seattle, tenu du 11 au 16 mars dernier, les intentions d'Aéro Montréal étaient clairement affichées.

«Nous avons un programme appelé MACH, rappelle Mme Benoît. Il vise à faire de certaines de nos PME des fournisseurs offrant un produit plus intégré. Vingt entreprises montréalaises sont inscrites à MACH. Dès les rencontres de mars, elles étaient représentées à Seattle. Le message était clair: nous voulons qu'elles aient accès à Boeing et à ses grands sous-traitants.»

Mais cette recherche de nouveaux clients ne va-t-elle pas déplaire aux donneurs d'ordre montréalais? Bombardier acceptera-t-elle de voir ses sous-traitants montréalais courtiser Boeing?

«Au contraire, répond Claire Auroi, directrice de la chaîne d'approvisionnement de Bombardier. Nous croyons qu'un sous-traitant qui élargit sa clientèle pourra progresser en matière de technologie. Cela ne peut que nous être profitable. Et, avec un grand client en plus, sa solidité financière s'accentue. Tout cela est excellent pour nous.»

Et comme rien n'est plus convaincant que l'argent, Investissement Québec, le Fonds FTQ, la Caisse de dépôt et placement et BDC Capital de risque, accompagnateurs financiers de la grappe montréalaise de l'aéronautique, étaient présents lors des discussions à Seattle et à Farnborough. On a ainsi voulu rassurer Boeing et sa garde rapprochée sur la capacité financière de nos PME pour répondre à la demande.

Les drones et le Plan Nord

La seconde entente, celle du 11 juillet dernier, visait à ouvrir à nos PME le marché des drones, ces avions sans pilote. Elle a été signée avec Pégase, le pôle de compétitivité aéronautique et spatial de la région française Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Pégase regroupe tous les acteurs de la région qui cherchent à concevoir les aéronefs sans pilote de l'avenir.

Pourquoi porter tout à coup son attention vers les drones? «D'abord parce que la Défense canadienne s'y intéresse au plus haut point», répond Suzanne Benoît. La Défense projette en effet d'acquérir un drone de surveillance et d'acquisition de cibles nommé JUSTAS (Joint Unhabited Surveillance and Target Acquisition).

Ce projet, qui souffre d'un certain retard, a comme échéancier 2014-2017. À lui seul, il justifie une alliance avec les experts de Pégase. Mais il y a d'autres motifs pour que la grappe montréalaise s'intéresse aux drones.

Et tout d'abord, le Plan Nord. «Comment surveiller, par tous les temps, des centaines de kilomètres de routes, de chemins de fer et de lignes de transport d'électricité sans mettre la vie des pilotes en danger, demande Mme Benoît. Le drone est une solution idéale. Avec la miniaturisation des appareils de détection et de surveillance, on peut mettre dans les airs un aéronef relativement petit, peu coûteux à fabriquer et économe en carburant.»

La présidente d'Aéro Montréal affirme aussi qu'avec ses milliers de kilomètres de frontières, les services frontaliers canadiens auraient avantage à remplacer par des drones les coûteux hélicoptères de surveillance.

Pour finir, rappelons la création, cette année, du Centre d'excellence sur les drones à Alma. Ce centre offre à l'industrie des services de recherche et développement, de tests au sol et en vol et de la formation. Un complément à l'entente avec Pégase.