Dan Tolgyesi ne fait pas partie de ceux qui vont pleurer la disparition du placement syndical sur les grands chantiers de construction.

Le président et directeur général de l'Association minière du Québec (AMQ) est, au contraire, très favorable à presque tout le contenu du projet de loi 33. Et principalement à la partie qui veut abolir le droit de gérance à l'embauche des grandes centrales sur les chantiers majeurs de construction comme les grandes mines.

Le projet de loi 33 est la réponse de Lise Thériault, ministre du Travail, au rapport du Groupe de travail sur le fonctionnement de l'industrie de la construction ou rapport Matteau, du nom de son président, Fernand Matteau.

Ce rapport, remis le 20 août dernier, constate que les syndicats peuvent contrôler l'offre de travail sur les chantiers, exercer des pressions sur l'employeur pour qu'il embauche leurs membres ou punir un ouvrier quelque peu dissident en le privant d'ouvrage.

La ministre s'est dès lors donné un but: l'abolition pure et simple du placement syndical, la gérance effective de l'embauche sur les chantiers.

«C'est plus que la gérance de l'embauche, renchérit Dan Tolgyesi, c'en est rendu à une gérance concrète de l'exécution des travaux. Si une société minière décide qu'il faut poser 120 mètres de tuyaux de quelque nature, le délégué syndical a le pouvoir de réfuser.»

Et pour M. Tolgyesi, le facteur chaotique du placement syndical ne s'arrĂŞte pas lĂ .

«Supposons que, pour trois semaines, j'ai besoin de 20 plombiers ou de 20 personnes membres d'un certain corps de mĂ©tier. Bien. Le syndicat m'en recommande 20, tous bien formĂ©s, compĂ©tents, expĂ©rimentĂ©s et disponibles. J'embauche. On travaille trois jours et le quatrième, juste comme mes plombiers deviennent vraiment productifs parce qu'ils se sont acclimatĂ©s aux lieux de travail, etc., le syndicat m'en envoie 20 nouveaux!»

Nouvelles pratiques

Ce sont les syndicats qui ont en main les précieuses listes de référence, sorte de fichier où chaque travailleur est suivi d'année en année et qui relève compétence, formation, expérience et disponibilité.

La Loi 33 prévoit que dorénavant la référence sera faite par la Commission de la construction du Québec (CCQ).

Certains ont fait valoir que la CCQ n'a pas de système établi de référence. «J'ai parfaitement confiance que la Commission peut se doter d'un bon système de référence dans des temps acceptables», réplique le patron de l'AMQ.

Ce dernier est également favorable à l'instauration d'un régime de négociations de conventions collectives entre l'Association de la construction du Québec et les grandes centrales «à condition que l'Association vienne parler aux sociétés minières, à l'AMQ, avant d'aller négocier, et même pendant les négos. Nous sommes un important donneur d'ouvrage, nous apprécierions beaucoup avoir une voix au chapitre.»

Finalement M. Tolgyesi adresse une véritable supplique à la ministre Thériault: «Est-il vraiment nécessaire que j'aie sur le chantier de construction de la société minière un délégué syndical par corps de métier et par syndicat? Par exemple, le délégué des trois plombiers de la FTQ, celui des six plombiers de la CSN, etc.? Tout ça, aux frais de la princesse? Serait-ce contrevenir à quelque plan divin que de n'avoir qu'un délégué par corps de métier?»