Le jeu de mots est sans doute facile, mais il colle à la réalité: en 2002, plusieurs employés et cadres de Financement agricole Canada (FAC) travaillaient chacun dans son coin et la collaboration n'était pas une valeur importante.

«On travaillait en silos, se souvient Vincent Giard, vice-président, opérations, Québec. Dans certains cas, l'isolement frôlait même la compétition avec les collègues plutôt que la collaboration. La rivalité et les guéguerres internes, c'est inacceptable. Et dans ce climat de méfiance réciproque, les subalternes n'osaient pas critiquer les attitudes de leurs cadres. Il a fallu briser le mur du silence.»

C'est le sondage Aon Hewitt pour Employeurs de choix qui a le plus spectaculairement révélé les effets nocifs de cette attitude du chacun-pour-soi. Le niveau d'engagement était médiocre, à peine la note de passage, 60%. «C'est ce qui a fait que nous nous sommes engagés alors dans une transformation culturelle fondamentale, dit M. Giard.»

Responsabilisation

Quelques principes de base sont alors arrivés à l'avant-scène. Au tout premier rang, la responsabilisation. Dès que l'on se déclare responsable collectivement du succès de l'entreprise, des cloisons doivent s'abattre. «On devient responsable du succès des collègues, énumère M. Giard. On s'engage à respecter les engagements et les promesses faits aux clients et aux partenaires. On vit dans un climat où on ne craint pas de prendre la parole. On devient soucieux de la façon dont son leadership est perçu par autrui plutôt que de camper obstinément sur des positions qui ne donnent aucun résultat.

S'agissant justement de partenariats, un autre principe de base est celui des «partenariats engagés». «Nous voulons dire par là que tous nos employés doivent rester ouverts à l'encadrement, à des communications de type rétroaction dans le but d'améliorer les pratiques de chacun. On est prié de laisser son ego à la poste. On est encouragé à rechercher activement l'encadrement plutôt que d'attendre passivement les ordres, précise M. Giard. Nous nous engageons certainement à montrer de la reconnaissance quand elle est méritée, mais à l'autre bout du spectre nos employés et cadres ne doivent pas non plus fuir les communications moins agréables. La collégialité, ça inclut de se parler franchement.»

Et puis quand on a échappé son assiette, qu'on a renversé la soupière, c'est collectivement qu'on passe la vadrouille. «L'attitude à avoir, c'est d'écouter pour comprendre l'impact d'une erreur sur le reste de l'équipe. Puis de nettoyer en équipe», insiste Vincent Giard.

Remontée spectaculaire

La révolution culturelle amorcée il y a sept ou huit ans donne des résultats. «Il est clair que la communication, qui est la clé de tout le reste, s'est améliorée immensément, estime M. Giard. Le sentiment d'engagement ou de mobilisation est également en hausse constante, selon les mesures que nous fournit annuellement le sondage Aon Hewitt. Nous évaluons aussi des changements profonds d'attitudes, comme la confiance, le fait qu'on donne de plus en plus le bénéfice du doute à autrui.»

Si les détails des résultats du sondage ne sont pas tous divulgués au public, le classement de Financement agricole Canada au palmarès Entrepreneurs de choix en dit long. Partie en 50e position canadienne en 2002, la société de prêts pour l'industrie agroalimentaire se classe en 4e place en 2011. La mesure globale du niveau d'engagement des employés et cadres est partie de 60% en 2002 pour atteindre 84% au niveau national en 2011. Et les employés et cadres du Québec (110 personnes) sont engagés à 89%! Pendant ce temps, le portefeuille de prêts de la société a doublé.