Un mois après l'adoption du projet de loi 28, le monde municipal est à revoir sa façon de faire du développement économique, qui ne passe plus obligatoirement par les CLD et par les CRÉ. Les décideurs politiques prennent conscience de l'ampleur des changements.

«Nous n'avons guère le choix de faire face à la réalité», concède Suzanne Roy, présidente de l'Union des municipalités du Québec (UMQ).

Elle ne cache pas que l'élimination des CLD, autant que celle des CRÉ, obligera les principaux acteurs économiques dans les villes du Québec à «faire plus avec moins».

Les outils de développement risquent de faire défaut et les efforts de concertation seront considérablement amoindris.

«On doit composer avec des budgets fortement amputés, répète la présidente, et avec tous ces millions manquants, on ne peut faire de miracles. C'est le grand défi auquel fait face le monde municipal.»

Elle souligne que les PME sont à la base du développement de nos villes et de nos régions. «Mais peu importe le contexte économique, il ne faut surtout pas laisser les entrepreneurs en plan, dit-elle. Nous devons continuer de leur fournir les ressources nécessaires pour leur permettre de réaliser leurs projets porteurs d'emplois.»

Maintenir la pression

Suzanne Roy, deuxième femme à occuper la présidence de l'UMQ en 100 ans d'existence, entreprend la deuxième année de son mandat.

Elle admet que le gouvernement joue la partie dure avec les municipalités. «On a du mal à comprendre la position du gouvernement», analyse-t-elle.

En agissant de la sorte, le gouvernement risque de priver les villes d'investissements, croit-elle.

«On nous parle de l'importance d'atteindre l'équilibre budgétaire, dit-elle, mais nous, on dit que cet équilibre se réalise en créant des emplois, pas en coupant dans les services pour les stimuler.»

Parce qu'il faut comprendre que les villes font un lien direct entre le désinvestissement de l'État et le fardeau fiscal de plus en plus lourd qu'elles doivent soutenir. «Chaque fois que le gouvernement veut régler ses problèmes financiers, il se tourne vers les villes, déplore Suzanne Roy, également mairesse de Sainte-Julie. Or, la tentation est trop grande pour l'État de se tourner vers les villes.

«On a envoyé un signal d'alarme, ajoute-t-elle. On veut discuter du pacte fiscal avec le gouvernement. C'est un dossier majeur. On va maintenir la pression.»

Du CLD à la MRC

Le temps presse pour «relancer» les CLD sous une nouvelle formule afin de continuer à offrir des services aux entrepreneurs qui cognent à notre porte, soutient Mme Roy.

«Il n'y a pas de formule bien précise, souligne-t-elle. Ce sera adapté à la réalité de chacun. Mais si on veut continuer d'aller de l'avant, il nous faudra travailler dans une structure amaigrie.»

Dans sa ville, Sainte-Julie, le CLD a cessé ses activités il y a un peu plus de deux semaines. «Les employés ont basculé dans la MRC, dit-elle. Il y a eu deux pertes d'emploi, on a éliminé les volets culture-tourisme et entrepreneuriat. On a réinventé une nouvelle structure.

«Des employés vont travailler selon des horaires réduits ou allongés. On est obligés de demander ces efforts.»

Solidarité municipale

Chose certaine, la solidarité du monde municipale n'a jamais été «aussi grande» et elle implique «Montréal et Québec», tient à souligner Suzanne Roy, alors que s'ouvrent aujourd'hui, à Montréal, les Assises annuelles de l'UMQ.

Le ministre des Affaires municipales, Pierre Moreau, a confirmé sa présence, précise la mairesse de Sainte-Julie, qui s'attend à ce que les discussions soient «assez costaudes» et «teintées» par les enjeux brûlants d'actualité.

«Il va falloir que le gouvernement livre, annonce-t-elle. Il y a de très forts vents et de fortes bourrasques.»

Suzanne Roy aimerait que le gouvernement Couillard «reconnaisse le rôle des gouvernements de proximité que sont les villes et les municipalités, par une loi».

«Ça existe dans d'autres provinces, dit-elle. L'Ontario et la Colombie-Britannique laissent plus d'autonomie aux gouvernements locaux. Pour cela, il faut faire preuve de plus d'imagination.»