La région est encore trop dépendante des grandes entreprises locales et de leurs chantiers. Carl Côté, directeur général du groupe-conseil Nutshimit-Nippour, et Eloïse Harvey, vice-présidente corporative du Groupe Céger, sont des exemples d'entrepreneurs qui ont acquis une expertise grâce aux grands donneurs d'ordre locaux, mais qui ne s'arrêtent pas là.

Diversification

Âge: 44 ans

Responsabilités: directeur général du groupe-conseil Nutshimit-Nippour et président de la table en entrepreneuriat de la région

Au Saguenay - Lac-Saint-Jean depuis: sa naissance

Carl Côté, convaincu de l'importance de l'acceptabilité sociale des projets économiques, et notamment auprès des Premières Nations, a fusionné son entreprise l'automne dernier avec celle d'un entrepreneur autochtone de la communauté Mashteuiatsh, un partenaire de longue date. Le groupe-conseil Nutshimit-Nippour est notamment spécialisé dans les études environnementales, la géomatique et les projets d'aménagement.

«Cette fusion nous a permis de sauvegarder nos emplois (une vingtaine) tandis que le contexte économique est peu favorable», explique le chef d'entreprise.

Pour prendre le relais des secteurs traditionnels, Carl Côté fonde beaucoup d'espoir sur les projets miniers et le Plan Nord. «La région a des atouts pour bien se positionner: nous sommes proches d'une voie maritime, ce qui est primordial pour les compagnies minières», estime Carl Côté.

La région peut également compter sur un écosystème d'entreprises de services qui ont acquis une expertise utile aux minières (environnement, génie, etc.) et une main-d'oeuvre qualifiée.

Toutefois, ajoute-t-il, «améliorer le réseau de transports (voies ferrées, routes, infrastructures portuaires) pourrait contribuer à désenclaver la région».

Indépendance

Âge: 39 ans

Responsabilités: vice-présidente corporative du Groupe Céger

Au Saguenay - Lac-Saint-Jean depuis: sa naissance, mais depuis sept ans à Montréal pour concevoir les activités du groupe saguenéen hors de la région.

Eloïse Harvey est fière du chemin qu'a parcouru l'entreprise familiale. «Rio Tinto Alcan (RTA) a été la locomotive de notre activité, mais on a travaillé pour éviter d'être dépendants de lui. On a utilisé l'expertise acquise avec lui pour développer notre activité hors de la région et même du Québec. Aujourd'hui, RTA représente 7 % de notre chiffre d'affaires, et plus de la moitié de celui de notre entité construction vient de nos activités hors Saguenay», explique-t-elle.

Selon elle, la présence des grandes entreprises implantées localement est donc un atout, pour autant qu'on «ne reste pas à leurs crochets». Mais c'est un défi de taille difficile à relever étant donné la difficulté à recruter. Certes, le bassin local existe, mais il n'est pas toujours suffisant, et celui des travailleurs mobiles et bilingues est encore plus restreint. «On a fait beaucoup d'efforts pour faire venir des travailleurs dans la région, mais quand l'activité diminue, ils repartent et c'est quasiment impossible de les faire revenir», constate Eloïse Harvey

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Eloïse Harvey est la vice-présidente corporative du Groupe Céger. Lancement de la campagne PROSPERITE QUEBEC, qui vise a liberer le plein potentiel economique du Quebec.

Forces

Des signes d'embellie économique apparaissent. Au premier chef : «des projets miniers qui progressent bien», indique Chantale Routhier, économiste au Mouvement Desjardins. Le plus avancé est celui d'Arianne Phosphate pour l'exploitation d'une mine de phosphate au lac à Paul.

«Les secteurs traditionnels - aluminium, pâtes et papiers et foresterie - également ont de bonnes nouvelles, ajoute l'économiste: entre autres, des investissements de 471 millions dans la région que prévoit Produits forestiers Résolu et un accord entre Rio Tinto Alcan et le gouvernement qui a permis la prolongation de vie des cuves du complexe Jonquière.»

Plusieurs facteurs externes pourraient également être favorables, notamment aux entreprises exportatrices de la région: la baisse du huard, la reprise américaine et la baisse du prix du pétrole.

Dernier atout de taille pour la région: sa productivité a beaucoup progressé (+ 17% contre près de + 8% pour le Québec entre 2002 et 2012), selon une étude de HEC Montréal.

Défis

Les secteurs traditionnels ont encore un poids prépondérant dans l'économie de la région. La conjoncture difficile dans ces trois secteurs pèse lourd, comme le montre le taux de chômage en augmentation constante au cours des dernières années (8,1% en 2010 contre 9,8% en 2014).

Mais «même si de grands efforts sont consentis, la diversification de l'économie est seulement émergente», note Chantal Routhier.

La région, habituée aux grandes entreprises pourvoyeuses d'emplois, manque de fibre entrepreneuriale, ce qui rend difficile la relève des entrepreneurs retraités.

Or, la région, déjà particulièrement touchée par le vieillissement de sa population, affiche une faible croissance démographique (+ 0,6% entre 2011 et 2016 contre 4,4% pour le Québec) et attire peu de nouveaux habitants, ce qui représente «un défi en termes de main-d'oeuvre tant pour remplacer les départs à la retraite que pour assurer la croissance des entreprises», constate l'économiste du Mouvement Desjardins.



PHOTO MICHEL TREMBLAY, LE QUOTIDIEN

Plusieurs facteurs externes pourraient également être favorables, notamment aux entreprises exportatrices de la région: la baisse du huard, la reprise américaine et la baisse du prix du pétrole.

Le Saguenay-Lac-Saint-Jean en chiffres

Les 5 grands employeurs du secteur privé

Rio Tinto Alcan: 5200

Produits forestiers Résolu: 2100

Groupe Ceger: 500

Groupe Gilbert: 450

Groupe Alfred Boivin: 350



Les trois plus grands secteurs d'activité


Commerce de détail: environ 17 000 emplois

Soins de santé: environ 15 800 emplois

Fabrication: environ 15 1000 emplois

Les entreprises dont le siège social se trouve dans la région



Cégertech WorleyParsons:
Chicoutimi

Devinci: Chicoutimi

Groupe Alfred Boivin: Chicoutimi

Cégerco: Chicoutimi

Proco: Saint-Nazaire



Les trois grandes villes




Saguenay :
146 308 habitants

Alma: 31 334 habitants

Dolbeau-Mistassini: 14 396 habitants

Sources des chiffres : MAMROT et CLD du Saguenay

 Saguenay-Lac-Saint-Jean

- Population active (de la région): 136 400 (2014)

- Taux de chômage (de la région): 9,8% (2014)

- Revenu disponible par habitant (de la région): 25 069$ (2013)



Au Québec



- Population active (du Québec):
4,367 millions (2014)

- Taux de chômage (du Québec): 7,4% (janvier 2015)

- Revenu disponible par habitant (du Québec): 26 774$ (2013)



Source: Institut de la statistique du Québec, Portrait régional du ministère de l'Économie, de l'Innovation et des Exportations.