Les intervenants de l'industrie aéronautique sont unanimes pour dire que l'avenir repose sur la construction d'appareils plus écologiques et moins énergivores. Ce sera la clé de la compétitivité dans le domaine de l'aviation au cours des prochaines années.

La démarche vers la production d'un avion écologique au Québec passe entre autres par cinq projets de démonstration, issus des travaux du chantier Innovation d'Aéro Montréal. Ces projets seront développés grâce à un partenariat public-privé de 150 millions. Six grandes firmes piloteront les projets avec l'aide de PME et de centres de recherche.

Cette initiative est importante, car elle comble un manque dans le continuum de la démonstration des technologies, explique Guy Lambert, directeur de la conception et du secteur expérimental chez Bombardier Aéronautique.

Les quatre prochaines années permettront d'amener la maturité de ces projets, d'abord conçus dans les universités et les centres de recherche, du niveau 4 au niveau 6. À ce moment, les technologies étant démontrées, elles seront disponibles pour être intégrées dans la conception des éléments de l'avion écologique. «Mais il faudra quatre à cinq ans de plus pour amener ces projets jusqu'au niveau 9, soit le produit final», dit Guy Lambert.

Voici une description de ces projets.

1) Les structures de fuselage

Ce projet, dirigé par Bombardier Aéronautique, sera mené conjointement avec Bell Helicopter Textron Canada. Une équipe à temps plein travaille sur ce projet.

Le but est de construire des fuselages plus légers afin d'obtenir une meilleure performance énergétique et une réduction d'émission de carbone.

Actuellement, les structures de fuselage sont principalement conçues à partir d'alliages métalliques. On vise à les remplacer par des matériaux composites à fibre de carbone.

L'utilisation de matériaux composites pose un défi additionnel à la construction des avions à cause de sa faible conductivité électrique, explique Guy Lambert. «Ils n'assurent pas la même protection électromagnétique que les matériaux utilisés actuellement», dit-il. Il reste donc beaucoup d'expérimentation à faire afin de s'assurer que chaque matériau soit sécuritaire.

Le projet visera également à développer des procédés de fabrication plus économiques, ainsi qu'à réduire le cycle de fabrication.

2) Les moteurs

Il va de soi que pour construire un avion écologique, il faut passer par le développement de moteurs qui consomment moins d'énergie. Ce projet est confié à Pratt & Whitney Canada.

La dynamique du projet tourne autour du développement d'un compresseur haute pression nouveau et plus efficace. Plus le rapport de pression du compresseur sera élevé, moins on aura besoin de carburant. Il faudra aussi développer de nouveaux matériaux qui résisteront à la chaleur dégagée par l'augmentation de la compression. Des alliages de nickel seront expérimentés.

Le projet portera aussi sur l'étude de nouveaux procédés pour réduire les coûts de fabrication et d'entretien des nouveaux moteurs.

3) Les trains d'atterrissage

Les trains d'atterrissage sont actuellement faits à partir de matériaux à base d'acier, jumelés à des traitements de surface qui améliorent la résistance à la corrosion, explique Gilles Labbé, président d'Héroux-Devtek. Cette entreprise est le troisième fabricant mondial de trains d'atterrissage.

Le but sera de développer des trains d'atterrissage plus légers, plus durables, tout en offrant à même résistance à la corrosion.

La recherche portera sur le développement de matériaux plus performants, composites ou autres types d'alliage. «Ce sera l'occasion d'examiner tous les alliages de nouvelle génération», dit Gilles Labbé.

Une équipe est en formation, et des discussions ont été entreprises avec d'autres partenaires de la chaîne d'approvisionnement.

4) L'avionique intégrée pour des applications cockpit

L'objectif est d'améliorer la gestion de la navigation, qui n'est souvent pas tout à fait adéquate dans plusieurs appareils autres que les plus gros et les plus récents. La tâche a été confiée à la firme Esterline CMC Électronique.

Le trafic aérien engorge de plus en plus les aéroports, forçant des retards dans les atterrissages et un gaspillage de carburant. La météo est aussi un autre facteur de retard au décollage, comme à l'atterrissage.

Esterline CMC Électronique a donc le mandat de travailler sur des technologies de cockpit en vue d'améliorer la performance de navigation et de mieux prédire le moment de l'atterrissage. Tout ça pour permettre une réduction de l'empreinte énergétique.

L'objectif de la recherche est de réaliser une intégration plus importante des fonctions à bord du poste de pilotage. Patrick Champagne, vice-président, postes de pilotage et intégration de systèmes chez Esterline CMC Électronique, a récemment expliqué qu'il «s'agit de regrouper en face du pilote les ressources de calcul, d'affichage de commande et de lecture de signaux dans un ensemble physiquement plus petit, comme on affiche différents programmes sur un même écran d'ordinateur».

5) L'avionique intégrée pour systèmes critiques

L'objectif est d'intégrer sur une même plateforme informatisée les systèmes critiques des avions, soit les commandes de vol, ailes, moteurs ou trains d'atterrissage. C'est le groupe Thales, en collaboration avec Bombardier Aéronautique, qui est chargé du projet.

Cette intégration permettra de réaliser des économies sur la quantité de cuivre installée. Mais aussi, elle permettra d'optimiser les performances grâce à des allègements de structure, une réduction de la trainée et un besoin en énergie de fonctionnement réduit.

Une autre conséquence sera d'améliorer le confort des passagers en amortissant les effets des turbulences et en facilitant les changements de direction.