Augmentation de l’efficacité énergétique, choix de fournisseurs durables, investissements selon les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) : les champs d’action sont larges pour développer une économie verte au Québec. Et chaque acteur a son rôle à jouer.

Pas moins de 83 milliards de dollars sur 10 ans, notamment pour doubler la production d’électricité renouvelable. Voilà comment le gouvernement canadien, dans son dernier budget, a répondu à l’Inflation Reduction Act, la stratégie américaine dotée d’une enveloppe de 370 milliards US pour appuyer la production d’énergie propre et son stockage.

« L’Europe a réagi en annonçant son Pacte vert, puis le Canada a fait de même afin d’éviter un exode des entreprises et de notre savoir-faire vers les États-Unis », indique Isabelle Dubé-Côté, présidente et cheffe de la direction d’Écotech Québec, la grappe des technologies propres au Québec.

L’organisme, qui organise la Semaine de l’économie verte qui commence ce lundi, joue notamment le rôle d’entremetteur entre les entreprises des différents secteurs d’activité et celles qui offrent des technologies propres. Par exemple, une PME qui a un entrepôt très énergivore doit trouver des façons d’être plus performante pour réduire ses coûts et son impact carbone.

PHOTO FLORIAN LEROY, COLLABORATION SPÉCIALE

Isabelle Dubé-Côté, présidente et cheffe de la direction d’Écotech Québec

Différentes solutions sont possibles, comme améliorer son isolation ou utiliser un mur solaire passif pour la convection naturelle de l’air par le soleil afin de répondre à d’autres besoins dans l’entreprise.

Isabelle Dubé-Côté, présidente et cheffe de la direction d’Écotech Québec

Les entreprises continuent d’ailleurs de développer et d’amener de nouvelles solutions sur le marché. C’est ce que fait Kourant Technologies. Elle a installé l’automne dernier sa première unité commerciale de traitement des eaux usées à L’Assomption, où un million de litres sont traités chaque jour. Grâce à la biologie et à l’électricité, la technologie permet d’éliminer l’azote et le phosphore qui contribuent à la prolifération d’algues bleues dans les cours d’eau, de même que des métaux lourds.

PHOTO KARENE-ISABELLE JEAN-BAPTISTE, COLLABORATION SPÉCIALE

Richard Painchaud, président de Kourant Technologies

Au Québec, la technique la plus utilisée actuellement est celle des étangs aérés qui laisse plusieurs contaminants aller dans les rivières. Notre système s’y attaque sans ajouter de produits chimiques et nécessite peu d’espace.

Richard Painchaud, président de Kourant Technologies

Il souligne que plusieurs autres municipalités pourraient se procurer la technologie au Québec, au Canada, aux États-Unis et en Europe. Mais il souhaite aussi aller vers différentes industries comme celles de l’agroalimentaire, des mines et du traitement des matières résiduelles. « La réglementation exigera de plus en plus que les entreprises de ces secteurs prétraitent les eaux qu’elles rejettent dans le réseau municipal », précise-t-il.

PHOTO FOURNIE PAR KOURANT TECHNOLOGIES

Kourant Technologies a installé l’automne dernier sa première unité commerciale de traitement des eaux usées à L’Assomption, où un million de litres sont traités chaque jour.

Accélérer le virage

Les entreprises, et particulièrement les PME qui constituent la grande majorité du tissu économique du Québec, doivent accélérer le virage vers la durabilité. En effet, d’après une enquête menée en 2020 par l’Institut de la statistique du Québec, seulement 4 % des PME de 5 à 249 employés se sont engagées dans une démarche de développement durable. « Cette transition peut représenter un défi, mais elle amène une plus grande efficacité opérationnelle et une meilleure compétitivité alors que les grandes entreprises sont obligées de divulguer leur impact sur le climat, alors elles choisissent des fournisseurs responsables », indique Isabelle Dubé-Côté.

Finance Montréal, la grappe financière du Québec, va même plus loin.

En Europe, une entreprise ne peut même plus se qualifier sur un appel d’offres public si elle ne montre pas qu’elle a fait des efforts pour réduire son empreinte carbone. Le Canada n’en est pas là et a une approche différente, mais un coup d’accélérateur se donne actuellement.

Florian Roulle, vice-président, finance durable, Finance Montréal

Les changements climatiques sont en train de redéfinir ce qu’est un avantage comparatif et un avantage compétitif, remarque Florian Roulle. « Les acteurs financiers, avant de prêter ou d’investir des sommes, regardent de plus en plus les critères ESG », précise-t-il.

Ainsi, les entreprises avancées dans le virage sont face à une foule d’occasions d’affaires et de nouveaux marchés à explorer. « Mais il reste que le carbone est immatériel et que pour le dirigeant d’une PME qui a déjà plusieurs responsabilités au quotidien, il n’est pas évident de savoir comment comptabiliser, gérer et suivre ses émissions de carbone dans le temps et d’intégrer un plan de décarbonation dans sa stratégie », explique Florian Roulle.

Finance Montréal a d’ailleurs reçu il y a quelques mois le mandat du ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs de déployer un réseau d’apprentissage en finance durable et action climatique. « Nous voulons que les PME comprennent comment le secteur financier regarde et évalue les enjeux ESG, alors nous organiserons des formations, nous présenterons des exemples à succès de transition, nous créerons des communautés de pratiques, nous concevrons des capsules vidéo, etc. », explique Florian Roulle.

Finance Montréal organise aussi le Sommet de la finance durable les 30 et 31 mai, à Montréal, qui donnera des outils aux PME pour mieux intégrer les critères ESG dans leur stratégie.