La Banque du Canada a relevé le 2 mars dernier son taux d’intérêt directeur pour la première fois depuis le début de la pandémie, et d’autres hausses sont à prévoir d’ici la fin de l’année. Quel sera l’impact sur les hypothèques ? Avis d’experts et témoignage.

Face à la hausse des taux d’intérêt, il n’existe malheureusement pas de recette miracle qui s’applique à tous les scénarios. Il faut développer sa propre solution, estime Carl Thibeault, vice-président principal, Québec, d’IG Gestion de patrimoine.

« Comme propriétaire, il faut d’abord vérifier si l’échéance de son hypothèque approche, souligne-t-il. Il faut aussi connaître quel est son taux actuel et voir si ça vaut la peine de revoir, voire de casser, son contrat. »

Le dirigeant de la société d’investissement avoue que les prévisions sont difficiles à faire. « C’est le bon moment de consulter un professionnel. C’est plate à dire, mais il n’y a pas une seule réponse. Tout dépend des objectifs et du budget de chacun. »

Celui qui est déjà pris à la gorge ne prendra pas nécessairement les mêmes décisions que celui qui a plus de moyens financiers.

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Carl Thibeault, vice-président principal, Québec, d’IG Gestion de patrimoine

Si on a par exemple un emprunt hypothécaire de 300 000 $, une hausse de 1 % peut accroître la mensualité de manière significative. Le propriétaire doit se demander s’il est capable de payer 250 $ de plus par mois.

Carl Thibeault, vice-président principal, Québec, d’IG Gestion de patrimoine

Taux fixe ou variable ?

Une hypothèque ne se résume pas à son taux, mais il s’agit néanmoins d’un élément majeur. Alors, que choisir entre un taux fixe et variable ? « En ce moment, nous avons plusieurs clients qui ont bénéficié d’un excellent taux variable dans les dernières années. Avec un tel écart avec le taux préférentiel, ils gagnent à garder leur contrat même avec une hausse des taux », répond John Fucale, vice-président principal, relation courtiers, chez Multi-Prêts Hypothèques.

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John Fucale, vice-président principal, relation courtiers, chez Multi-Prêts Hypothèques

L’expert est d’avis qu’à moins d’être trop stressé par l’incertitude, le taux variable est une meilleure option que le taux fixe, et ce, « depuis 70 ans ».

Certains prêteurs offrent aussi la possibilité de payer un versement fixe pour pallier les augmentations. De cette façon, le propriétaire sait combien il doit payer même si le taux change. Par contre, la durée du prêt augmente puisqu’il paie moins de capital chaque mois.

Carl Thibeault remarque pour sa part qu’un taux fixe permet d’acheter la paix d’esprit, surtout si on a des ressources plus limitées. « Ce ne sera peut-être pas le plus avantageux, mais ça nous donne une sécurité. »

Précipiter les choses

Dans la situation actuelle, certains pourraient être tentés de rompre leur contrat hypothécaire pour bénéficier d’un meilleur taux. « Il faut toutefois regarder s’il y a des pénalités à le faire », prévient Carl Thibeault.

Mariève Paradis, elle, n’a pas attendu les bras croisés. L’agente d’information dans le réseau de la santé a fait casser en février son hypothèque qui devait venir à échéance en mars 2023. « J’avais un terme fermé de cinq ans à un taux de 2,45 %. Selon certains économistes, ça pouvait monter de 1 % d’ici l’an prochain et je trouvais que c’était beaucoup », dit-elle.

Avec son institution financière, elle a évalué différents scénarios avant d’opter pour une hypothèque à taux variable sur cinq ans dotée d’un seuil plancher et d’un seuil plafond. « Je ne peux pas aller plus haut ou plus bas que tant, mais je suis pour l’instant à 1,44 %. C’est quand même 1 % de moins que ce que j’avais », se réjouit Mariève Paradis, qui a l’impression d’avoir fait une bonne affaire.

« En plus, les intérêts que j’aurais payés jusqu’en 2023 avec mon ancienne hypothèque remboursent les pénalités causées par le bris de mon contrat », ajoute-t-elle.

Réserver un taux

Les futurs acheteurs et les propriétaires peuvent également réserver un taux hypothécaire jusqu’à 120 jours avant l’achat d’une nouvelle maison ou la date de leur renouvellement.

« L’avantage, c’est d’avoir la garantie que le taux ne changera pas même s’il y a une hausse », explique John Fucale, qui pense toutefois qu’il n’y a pas lieu de paniquer. « Le plan de match n’a pas changé. Le consommateur peut encore bénéficier de très bons taux, qui sont historiquement plus bas que ce qu’on a vu dans les 100 dernières années. »