Martin Marion, copropriétaire de la pépinière Premier Plant à Saint-Sulpice, déteste le gaspillage. Pour lui, cela n’a aucun sens de jeter autant de produits qui pourraient être revalorisés. Producteur, manufacturier et fournisseur de systèmes modulaires prévégétalisés conçus pour des toitures vertes, il a trouvé des solutions plus écologiques pour la fabrication de ses produits.

En collaboration avec le Centre de développement de bioproduits Biopterre, il a développé un mycomatériau conçu à partir d’un alliage de chanvre et de champignons qui servira à remplacer les traditionnelles boîtes de plastique. « En ce moment, nous testons la durabilité du prototype. Dans un an, je vais avoir assez de données pour mettre le tout en production. »

Persuadé que ce matériau peut convenir à d’autres usages, l’homme d’affaires souhaite que d’autres PME s’intéressent à ce procédé. « Certains vont dire que je dévoile le secret de ma Caramilk, mais je pense que cette innovation peut être utile autant en construction qu’en horticulture ou dans le domaine du design. On ne manquera pas de matière, car les producteurs de chanvre québécois suffisent amplement à la demande. »

La seconde vie de déchets de construction

Quand tout sera au point, l’entrepreneur aura atteint son objectif d’offrir un système 100 % québécois. Un long chemin qu’il a entrepris en 2011.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Martin Marion, copropriétaire de la pépinière Premier Plant, à Saint-Sulpice

À la base, je suis un pépiniériste qui amène à maturité des plants directement de mes champs. Je n’avais toutefois aucun contrôle sur le coût des autres matières, dont le substrat nécessaire aux besoins de mes plantes.

Martin Marion

Avec un dollar canadien toujours inférieur à la valeur du dollar américain et des distances effarantes à parcourir pour accéder à ces matières, il a cherché dès 2012 à trouver une solution de rechange au premier ingrédient de sa recette de substrat, soit la composante minérale.

« La minéralisation dans le substrat est essentielle, car elle aide à la rétention d’eau, c’est donc un ingrédient important qui ne peut pas être changé par n’importe quoi », explique-t-il.

En partenariat avec le Centre de transfert technologique en écologie industrielle (CTTEI) à Sorel, il découvre que les briques peuvent très bien remplacer la roche en provenance de l’autre côté de la frontière. « La brique provient d’immeubles démolis. Si je ne la revalorise pas, toutes ces briques prennent le chemin du dépotoir. »

Un partenariat avec l’hôpital de Joliette

Après cette première réussite, le pépiniériste s’est attaqué à la matière organique présente dans son substrat. Étonnamment, après plusieurs essais avec de nombreuses substances, c’est à l’hôpital de Joliette, plus précisément dans les cuisines, qu’il a trouvé la solution. Aux prises avec un problème d’odeur et de gestion des restes des 730 000 repas qu’il prépare par année, l’établissement s’est muni d’un déshydrateur.

« La machine transforme 120 tonnes de nourriture en 40 tonnes de poudre de résidus organiques déshydratés dont je me sers pour nourrir les plantes. »

Un marché en croissance, mais rempli de défis

Les produits de Premier Plant trouvent preneurs un peu partout au Québec, mais surtout à Toronto, où ce type d’installation est de plus en plus prisé. « On voit des toits verts surtout sur des bâtiments institutionnels, certifiés LEED ou encore pour des projets qui doivent compenser l’espace vert qu’ils n’ont pas. » Au Québec, c’est la région de Gatineau qui remporte la palme. « On aurait sûrement plus de clients ici si la législation concernant le poids des structures que l’on peut mettre sur les nouveaux bâtiments était adoptée. »

S’il a été un des premiers dans la province à offrir ce type de produit, l’homme d’affaires craint la concurrence des produits européens et américains. « Ce que je déplore, c’est que, lors d’appel d’offres, on regarde toujours le plus bas soumissionnaire, mais on fait peu de cas de l’économie circulaire et de l’impact environnemental, ce qui nous désavantage », dit Martin Marion.