Six mois après avoir annoncé une enveloppe de 130 millions de dollars pour accompagner les entreprises dans le virage numérique, le gouvernement du Québec accorde 52 millions de cette enveloppe à six partenaires, tant dans la construction, l’hôtellerie, le commerce de détail que la recherche universitaire, pour aider des PME dans leur transformation.

La somme restante de 78 millions sera engagée lorsque d’autres partenaires sérieux auront été trouvés, selon le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon. « La transformation numérique est un enjeu important et on espère qu’entre 12 000 et 15 000 entreprises pourront en bénéficier, mais ce n’est pas une course. Il faut être prudent et dénicher des partenaires avec lesquels faire le maillage et c’est là, le principal défi. »

Pour le ministre, cette étape de diagnostic et de recommandation n’est pas le seul chantier sur lequel il faut miser pour accélérer la transformation numérique. La formation de main-d’œuvre qualifiée et l’application de la recherche doivent aussi faire partie de la solution.

Le Québec performe du côté de la recherche, mais il doit faire mieux en ce qui concerne le développement. Il faut faire le pont entre la recherche et les entreprises.

Pierre Fitzgibbon, ministre de l’Économie

Sans forcer les établissements d’enseignement à rendre obligatoires les stages en entreprise, Pierre Fitzgibbon croit qu’il faut plus que jamais encourager ce genre d’initiatives. « Nos jeunes doivent comprendre ce qui se passe dans les entreprises. »

La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) salue l’initiative du gouvernement et croit qu’elle répond à un véritable besoin. « On note un manque de connaissances de la part de nombreuses PME du secteur des services. Elles affirment qu’elles ne savent pas comment intégrer le commerce en ligne à leur modèle d’affaires », explique Francis Bérubé, analyste principal des politiques pour la FCEI.

Pour la FCEI, il s’agit d’une première étape, mais il reste à voir combien d’entreprises vont être réellement touchées par ce programme. « Le problème est que souvent, les PME ne sont pas au courant. Il doit y avoir un gros travail de communication à faire sur le terrain pour faire connaître cette Offensive de transformation numérique (OTN) », affirme l’analyste.

Une annonce qui a ses limites

Le ministre Fitzgibbon est catégorique, il n’est pas question pour le gouvernement de payer pour l’implantation de systèmes de transformation numérique. La seule aide qui est apportée est sous la forme de prêt. Pour la FCEI, il s’agit là d’un enjeu important pour l’adoption du commerce en ligne, car les coûts d’élaboration d’une plateforme de vente en ligne et de traitement des paiements dissuadent un certain nombre d’entreprises de se lancer. « Le gouvernement pourrait collaborer avec les plateformes de commerce en ligne pour réduire leur coût d’exploitation afin que les PME puissent faire des ventes en ligne plus facilement et à moindre coût », suggère Francis Bérubé.

Une concurrence déloyale

Pour la FCEI, le besoin de diagnostic est présent plus que jamais, mais l’argent qui y est investi n’efface en rien l’iniquité fiscale qui existe entre les géants de l’internet et les PME québécoises. D’ailleurs, 88 % des propriétaires de PME disent que la position dominante des géants du commerce en ligne, comme Amazon, menace les petites entreprises canadiennes. Aussi, selon un sondage de la FCEI, huit propriétaires de PME sur dix pensent que les achats en ligne effectués auprès d’entreprises étrangères devraient toujours recevoir le même traitement fiscal que les achats faits dans des entreprises canadiennes. « Il faut s’attaquer à ce problème, et cela pourrait se faire au moyen de crédits d’impôt », propose Francis Bérubé.