Un projet de recherche acoustique unique au monde sera bientôt en place dans le fleuve Saint-Laurent. Baptisée « projet MARS », cette initiative scientifique prendra la forme d’une station de recherche installée au large de Rimouski. Objectif : réduire l’impact sonore des navires sur l’environnement et les mammifères marins. Les grands armateurs canadiens présents sur le fleuve participent au projet et en financent même une partie.

Si tout se déroule comme prévu, la station de recherche sera en place et fonctionnelle à partir de la fin de juillet 2021. Le projet est codirigé par l’Institut des sciences de la mer de Rimouski (ISMER) de l’Université du Québec à Rimouski (UQAR) et le centre de recherche appliquée Innovation maritime (IMAR). Une quinzaine d’emplois seront créés dans la foulée.

La station de recherche sera déployée dans l’estuaire du Saint-Laurent, au cœur du chenal Laurentien. La proximité, mais surtout la profondeur du site et les courants optimaux en font un endroit privilégié, affirme Guillaume St-Onge, directeur de l’ISMER.

Il existe déjà des endroits où on mesure l’empreinte acoustique sous-marine. Mais de par la profondeur de nos installations, la nature de nos équipements et nos méthodes de recherche, il s’agit d’un projet unique au monde. L’idée, c’est de développer cette expertise ici même au Québec tout en respectant les normes internationales.

Guillaume St-Onge, directeur de l’ISMER

De façon concrète, deux portes de mesure, espacées de sept kilomètres par des bouées d’émission, enregistreront en temps réel la signature acoustique des navires de la flotte des armateurs partenaires du projet, c’est-à-dire Transport Desgagnés, Canada Steamship Lines (CSL), Fednav et Algoma.

PHOTO FOURNIE PAR MULTI-ÉLECTRONIQUE

Exemple de bouée d’émission que fabriquera la PME rismoukoise Multi-Électronique dans le cadre du projet MARS

Des antennes hydrophones, attachées aux bouées, seront ainsi installées à des profondeurs variant de 80 à 300 m. Élément novateur, les navires seront également dotés d’équipements de mesure. Autrement dit, il sera possible de savoir exactement d’où viennent les différents bruits à bord du navire. Les armateurs pourront cerner les éléments générant ces bruits pour ensuite « évaluer et développer des méthodes de mitigation », rappelle l’ISMER.

Selon Pêches et Océans Canada, « les bruits d’origine anthropique [faits par les humains] peuvent masquer les sons qu’émettent les mammifères marins pour communiquer, s’orienter et trouver leurs proies [...]. Cela peut altérer leur comportement ou entraîner des pertes d’audition temporaires ou permanentes ».

Avec des PME d’ici

Outre l’ISMER et l’IMAR, le projet MARS (pour « Marine Acoustic Research Station » ou Station de recherche acoustique marine [SRAM]) fait appel au savoir-faire de deux entreprises de Rimouski : Multi-Électronique et OpDAQ Systèmes. Ces deux PME concevront les équipements de mesure dont seront dotés les navires, de même que les outils (bouées, câbles, hydrophones, etc.) qui se retrouveront dans le Saint-Laurent.

La station de recherche sera en place pour trois ans. En excluant cette année, elle sera déployée au printemps et récupérée à l’automne, avant la formation des glaces, à l’aide du navire de recherche Coriolis II, propriété de l’ISMER.

« C’est un beau partenariat entre armateurs et scientifiques », croit Guillaume St-Onge.

Les armateurs sont conscients qu’ils font du bruit. Ils sont proactifs et veulent des données scientifiques afin de pouvoir faire des gestes concrets.

Guillaume St-Onge, directeur de l’ISMER

Les données enregistrées par la station de recherche pourront éventuellement servir à d’autres applications, précise le directeur de l’ISMER. « Ça pourra notamment être utilisé pour les télécommunications ou divers usages en génie, dit-il. On va avoir une mine incroyable de données. »

Par ailleurs, le projet MARS est financé à hauteur de 6 millions de dollars entre autres par Transports Canada et le ministère de l’Économie et de l’Innovation du Québec.