Près de 60 % des dirigeants de PME québécoises ont 50 ans et plus. Le Centre de transfert d’entreprise du Québec (CTEQ) estime que d’ici deux ans, 37 000 propriétaires prendront leur retraite. Pour les repreneurs, il est temps d’agir. Mais il importe de respecter quelques règles pour assurer sa réussite. Deux experts offrent leurs conseils.

Êtes-vous prêts ?

Souvent oubliée par les repreneurs, l’introspection est la première étape avant d’entamer des démarches de transfert. « Tous les candidats que nous recevons veulent une entreprise rentable avec un marché établi et qu’ils ne paieront pas cher. Ils oublient parfois qu’acheter une entreprise n’est pas le point d’arrivée, mais le commencement », soutient Francis Beaulieu, conseiller au CTEQ. Il importe dès le départ de s’interroger sur ses besoins, son leadership, le mode de vie souhaité et les efforts envisagés afin d’assurer la pérennité d’une entreprise. « Il faut avoir envie de devenir entrepreneur. Acquérir une entreprise existante ne se fait pas à la légère et cela ne doit pas être fait par dépit ou pour fuir une situation qui ne nous convient plus », estime le conseiller du CTEQ.

La clause John F. Kennedy

Francis Beaulieu conseille fortement à un reprenant de discuter de son projet avec sa famille et avec son réseau. Il s’agit d’une façon de valider son choix, mais aussi de sonder son entourage sur d’éventuelles occasions d’affaires. Faisant le parallèle avec la célèbre phrase de John F. Kennedy, Étienne Drouin, directeur général, Capital de croissance et transfert d’entreprise Québec et Est-du-Québec, à la BDC, estime qu’un futur entrepreneur ne doit pas se demander ce qu’une entreprise peut faire pour lui, mais ce que lui peut lui apporter. S’il manque des cordes à son arc, il ne doit pas hésiter à faire des alliances. « Si on veut se lancer seul, on doit se demander quelles sont nos compétences et si on a toutes les habiletés requises pour diriger. Si on se rend compte qu’un partenariat serait préférable, cette personne doit nous être complémentaire et ne pas être choisie uniquement pour l’aspect pécuniaire. »

Ne pas tout chambarder

Un nouveau patron, ce sont de nouvelles façons de faire. Pour limiter le choc des cultures, il importe de ne pas tout chambarder dès le premier jour. « Il faut agir avec doigté et saisir la culture avec humilité. C’est le moment pour observer et interagir avec les employés, apprendre comment ces derniers travaillent. Il faut se faire accepter avec diligence », estime Étienne Drouin. Évidemment, si le projet concerne une entreprise dans lequel l’employé travaille déjà, ce partage va être facilité. Il n’en demeure pas moins que l’opération doit se faire en toute transparence. « Le dirigeant doit préparer son annonce et ne pas faire de cachette. C’est important d’expliquer les raisons de son choix. Le reprenant, de son côté, doit s’occuper de sa base parce qu’il ne s’agit pas uniquement de produits, mais d’humains derrière », conseille Francis Beaulieu.

Cédant et reprenant, une relation à établir

Lors d’un transfert, le vendeur est aussi important que l’acheteur et la relation entre les deux ne doit pas être négligée. C’est le moment de valider les motivations de celui qui prépare sa retraite et, pour le nouveau venu, d’assurer ses arrières. « Protégez vos pions, vous ne voulez pas que tout s’écroule parce que le vendeur a changé son fusil d’épaule. C’est pour cela que la lettre d’intention est si importante, elle vous protège », affirme Francis Beaulieu. Le projet aura lieu, c’est maintenant le temps de la transmission des savoirs, et la solution se trouve dans un plan d’intégration. « Le cédant ne doit pas déconnecter aussitôt que les papiers sont signés chez le notaire. Établir quels seront ses rôles et ses responsabilités et durant combien de temps sont des éléments à déterminer », estime Étienne Drouin.

De l’accompagnement offert

Acquérir une entreprise existante est plus onéreux que partir de zéro, mais le taux de succès est plus grand, selon les experts. Pour éviter les surprises désagréables, il vaut mieux s’entourer d’experts. « Le financement est plus facile pour une entreprise qui a déjà un historique, mais il faut faire attention à se garder une marge de manœuvre. Des clients, des fournisseurs, des employés qui quittent le bateau font partie des surprises qui peuvent arriver. On doit prévoir l’imprévisible », soutient Étienne Drouin. Francis Beaulieu est catégorique, un tel projet demande un accompagnement et il existe des ressources au Québec pour les futurs entrepreneurs.