En vue d’une reprise économique post-pandémie, Québec s’apprête à lancer une série de consultations auprès des dirigeants de PME afin de préparer la tenue d’un Sommet de l’innovation, le printemps prochain. Entrevue avec Luc Sirois, directeur général du Conseil de l’innovation et premier « innovateur en chef » du Québec.

De quelle façon comptez-vous amener les PME à sauter dans le train de l’innovation ?

Nous voulons mettre en place une véritable stratégie favorisant la recherche scientifique et les projets innovants [et pour y arriver], nous allons tenter de mieux comprendre les besoins et les attentes des chefs d’entreprise. On veut leur demander ce qui pourrait faire en sorte qu’ils deviennent [encore] plus imaginatifs.

Vous êtes d’accord sur le fait que le concept même d’innovation, ça reste un peu flou pour bon nombre de dirigeants de PME ?

Oui, c’est le cas. Voilà pourquoi il faut les amener à voir les choses autrement. Plusieurs pensent que l’innovation [ça se limite à] inventer de nouvelles technologies, mais on oublie qu’innover, c’est également se lancer à la chasse aux problèmes [de production, de distribution] qui permettront de trouver des solutions et de conquérir de nouveaux marchés.

Oui, mais les PME, déjà secouées par la pandémie, sont-elles prêtes à se lancer dans ce processus ?

Étonnamment, avant la crise sanitaire, la moitié des entreprises québécoises n’étaient pas intéressées par l’innovation, ni même par la transformation numérique. Cela tend à changer. On réalise de plus en plus que les PME qui ont tardé à bouger accusent du retard et que celles qui sont passées à l’action sont en bien meilleure posture.

Et pourquoi donc ?

Quand les choses iront mieux, il faut s’attendre à ce que les économies rebondissent. On va peut-être vivre au cours des 10 à 20 prochaines années une forte croissance. On a vu ça en 1918 après la grippe espagnole, ainsi qu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale. On se rappellera qu’il y avait eu une effervescence de nouvelles idées et de projets faisant appel à l’innovation. Cette fois encore, il ne fait aucun doute que les nations se préparent à rebondir. Le Québec est dans le même état d’esprit.

On parle beaucoup d’innovation, mais concrètement, ça signifie quoi pour les PME qui s’engagent dans cette direction ?

J’aime faire une analogie avec le hockey quand j’aborde cette question. Par exemple, si j’espère l’emporter par la marque de 3 à 2, c’est certain que je devrai tirer au filet à plus de trois reprises ! Plus je vais lancer la puck, plus grandes seront mes chances de compter un but et de créer des occasions. C’est la même chose dans le monde des affaires : il ne faut pas s’attendre à ce que tous les projets innovants se traduisent par une réussite, bien au contraire. Même que 9 fois sur 10, ça ne marchera pas.

Vous dites qu’au Québec, les PME sont bien accompagnées quand vient le temps d’innover…

C’est un secret bien gardé : nous comptons pas moins de 59 centres de transfert de technologies, affiliés au réseau des cégeps, dans tous les domaines. Nous avons également des spécialistes en développement des technologies, que ce soit pour le tissu intelligent, le manufacturier, la cybersécurité, le tourisme. Et les PME sont admissibles à des subventions pouvant atteindre 80 %. C’est sans compter les Regroupements sectoriels de recherche et d’innovation, au nombre de neuf, entre autres dans l’aéronautique, la santé, les technologies de l’information, les matériaux.