Alors que plus de 34 000 postes en fabrication aérospatiale seront à pourvoir d’ici 2029 d’après le Comité sectoriel de main-d’œuvre en aérospatiale au Québec, les entreprises doivent être stratégiques pour combler leurs besoins. État de la situation.

« Il y a trois ou quatre ans, j’affichais un poste et je recevais environ cinq CV, alors qu’aujourd’hui, j’en reçois un », indique Jacques Cabana, PDG de FDC Aéro Composites, qui cherche surtout des techniciens et des manœuvres spécialisés.

C’est ainsi même s’il a multiplié les sites et médias sociaux où il affiche ses postes.

C’est certain que puisqu’elle est située à Saint-Jean-sur-Richelieu, l’entreprise productrice de pièces d’avion en matériaux composites a un défi d’accessibilité.

« Bien des gens de Montréal, dont les nouveaux arrivants, souhaitent utiliser les transports en commun pour aller travailler », remarque Jacques Cabana, qui a une cinquantaine d’employés.

FDC Aéro Composites arrive tout de même à combler ses besoins, mais elle doit être stratégique. Par exemple, elle propose des horaires réduits aux employés expérimentés tentés par la retraite. Elle investit en automatisation. Elle mise aussi sur ses conditions de travail et ses mesures de conciliation travail-famille. L’entreprise doit toujours demeurer proactive, d’autant plus que comme PME, elle voit souvent ses employés partir travailler pour de grands donneurs d’ordres.

« Les PME sont un peu le club-école de la grande entreprise », indique M. Cabana.

Chez les grands aussi, la concurrence est féroce.

Depuis quelques années, pour les postes en ingénierie et en intelligence artificielle, un domaine rendu clé, on est en forte concurrence pour attirer les talents avec les grandes entreprises d’autres secteurs, comme Ubisoft et Google.

Kevin P. Smith, vice-président, ressources humaines, chez Pratt & Whitney Canada

La démographie est aussi un défi. À son centre de production principal à Longueuil, Pratt & Whitney Canada devra pourvoir près de 2000 postes en production dans les cinq prochaines années en raison des départs à la retraite.

Des diplômés recherchés

Cette pression se fait sentir jusqu’à l’université.

« Nous recrutons difficilement nos étudiants pour les études supérieures parce qu’après leur baccalauréat en génie aérospatial, ils se font offrir des postes intéressants en entreprise », indique Christian Moreau, directeur de l’Institut de conception et d’innovation aérospatiales de l’Université Concordia.

Le printemps dernier, un partenaire industriel a même embauché les étudiants impliqués dans le projet de recherche avant la fin de leur maîtrise et doctorat.

Aéro Montréal, la grappe aérospatiale du Québec, constate que les besoins sont encore plus criants pour les métiers. « Pourtant, l’École nationale d’aérotechnique a 1600 places, mais a environ 950 étudiants actuellement, alors il faut attirer plus de jeunes », affirme Suzanne Benoît, PDG d’Aéro Montréal.

Tout le secteur mobilisé

Aéro Montréal vient de réaliser un sondage auprès des jeunes sur leur perception du secteur. Il est ressorti que si plusieurs trouvaient le domaine aérospatial innovant, d’avenir et réputé internationalement, ils le voient aussi hors de portée.

« Plusieurs pensent que c’est seulement pour les ingénieurs et les scientifiques, alors qu’il y a des besoins pour différents profils, précise Mme Benoît. Nous avons du travail à faire pour mieux nous faire connaître. »

Le Chantier Relève et Main-d’œuvre d’Aéro Montréal a déjà mis sur pied différentes stratégies pour séduire les jeunes, mais les efforts se poursuivent. Avec le gouvernement, un projet-pilote de formation duale est en train d’être élaboré pour les jeunes de 16, 17 et 18 ans qui se feraient embaucher par une entreprise et seraient formés en même temps.

« Ça aiderait à prévenir le décrochage, précise Mme Benoît. On veut aussi aller chercher des filles avec ce projet. »