Si tout va comme prévu, Air Liquide Canada terminera cette année l’aménagement d’une nouvelle unité de production d’hydrogène à ses installations de Bécancour. L’ajout d’une unité d’électrolyse à membrane échangeuse de protons – la plus grande au monde – permettra à l’entreprise d’augmenter sa capacité de production de 50 % en plus de produire une partie de son hydrogène sans recourir aux combustibles fossiles.

Jacques Sénéchal, directeur en mise en place des investissements chez Air Liquide Canada, orchestre l’opération. « On a décidé de faire un pas en avant », lance l’ingénieur, encouragé par la demande accrue qui se dessine pour l’hydrogène liquide dans l’industrie des transports.

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Jacques Sénéchal, ingénieur et directeur en mise en place des investissements chez Air Liquide Canada

Selon lui, le Québec compterait présentement une cinquantaine de véhicules qui carburent à l’hydrogène liquide. À ceux-là s’ajoutent les parcs d’entreprises qui ont aussi fait le pari de l’hydrogène, notamment Walmart avec ses chariots élévateurs. « On voit une belle croissance », confirme l’ingénieur mécanique de formation.

Mais qui dit « hydrogène liquide » ne dit pas nécessairement « énergie propre ». Celui produit présentement à l’usine de Bécancour traîne avec lui une empreinte carbone en raison du procédé de « reformage du méthane » utilisé, qui requiert du gaz naturel.

Avec sa nouvelle unité de production alimentée par un électrolyseur de 20 MW, Air Liquide Canada produira de l’hydrogène « propre » à partir d’électricité et d’eau. L’entreprise estime qu’elle évitera ainsi des rejets de 27 000 tonnes de GES par année, ou l’équivalent de ce que génèrent annuellement 10 000 voitures.

Une fois activée, la nouvelle unité de production d’hydrogène « propre » deviendra de loin la plus grande au monde, confie M. Sénéchal. En plus, elle est déjà équipée du nécessaire pour liquéfier le gaz.

La plus grosse usine actuellement en service se trouve au Danemark et produit 1 tonne par jour. Avec Bécancour, on va en produire 8.

Jacques Sénéchal, directeur en mise en place des investissements chez Air Liquide Canada

Cela dit, l’ingénieur d’Air Liquide s’attend à ce que cette première soit vite dépassée. « Les [collègues] européens regardent beaucoup ce qu’on fait », dit-il. L’entreprise mère prévoit d’ailleurs aménager d’autres unités de production d’hydrogène « propre » ailleurs dans le monde dans un proche avenir.

Capter le gaz carbonique

Né en 1902, le groupe français Air Liquide s’est rapidement déployé sur la planète, ouvrant entre autres une division au Canada en 1911.

L’entreprise spécialisée dans la purification et le commerce des gaz poursuit depuis ses activités au pays. L’année dernière, elle a d’ailleurs inauguré deux unités de captation de gaz carbonique à Johnstown et Aylmer, en Ontario, toutes deux profitant des rejets carbonés d’usines de production d’éthanol cellulosique.

L’installation de Johnstown fournira pour la première fois au pays du gaz carbonique de qualité médicale. « Avant, il fallait l’importer », souligne M. Sénéchal, qui a supervisé le projet. L’installation fournira aussi les brasseurs et autres entreprises du secteur agroalimentaire qui requièrent du CO2.

Les ingénieurs d’Air Liquide se mêlent aussi des procédés industriels chez des clients potentiels. Au pays, ils collaborent notamment avec des sidérurgistes. « On essaie de voir si on ne pourrait pas introduire l’hydrogène dans les procédés de fabrication de l’acier pour réduire l’empreinte carbone de ces entreprises », explique M. Sénéchal, rappelant que deux tonnes de GES sont générées pour la fabrication de chaque tonne d’acier.