Le Québec compte plus de 80 incubateurs et accélérateurs qui aident année après année des centaines de jeunes entreprises à réussir. Portrait d’un écosystème de plus en plus diversifié, marqué par les spécialisations, la collaboration et les partenariats avec le milieu universitaire.

Les choses vont plutôt bien dans le milieu des incubateurs, même si tout n’est pas rose. « Oui, il y a un dynamisme. Mais d’un autre côté, seulement la moitié des entreprises sondées par la récente étude de Bonjour Startup Montréal vont utiliser l’accompagnement des incubateurs », constate Manaf Bouchentouf, directeur exécutif de l’Institut d’entrepreneuriat Banque Nationale – HEC Montréal.

Le principal défi concerne le positionnement, croit-il. « L’offre est grande. Les incubateurs doivent proposer des programmes très clairs, qui ciblent une clientèle précise. »

Selon Louis-Félix Binette, directeur général du Mouvement des accélérateurs d’innovation du Québec, le milieu a beaucoup évolué dans les dernières années. « On voit beaucoup de programmes naître, notamment en région. Toutes sortes de modèles émergent. »

Un incubateur pour chaque secteur

De l’industrie cosmétique à l’agroalimentaire, l’offre en incubation se diversifie aujourd’hui par secteur et en fonction des besoins. C’est le cas de MT Lab, premier incubateur en tourisme, culture et divertissement, qui a ouvert en septembre 2017.

« L’objectif était de créer un espace qui permettrait aux start-up de voir le monde du tourisme, de la culture et du divertissement comme un lieu d’innovation », explique son directeur général, Martin Lessard.

Ce dernier peut dire mission accomplie, puisque la demande ne se dément pas. Après une première cohorte de 8 jeunes pousses en 2017, puis de 12 en 2018, MT Lab accueille cette année 15 entreprises. En moins de deux ans, l’incubateur s’est fait connaître dans toute la francophonie. Il manque même d’espace et agrandira ses locaux pour offrir 30 places de cotravail de plus.

Échanges et « coopétition »

Avec plus de 80 incubateurs et accélérateurs au Québec, sent-on une certaine compétition ? Manaf Bouchentouf appelle plutôt ça de la « coopétition ».

« On coopère parce qu’on n’a pas le choix. L’entrepreneur aura, de toute manière, le réflexe de transiter par plusieurs programmes d’incubation. Le défi, c’est de travailler tous ensemble. »

 – Manaf Bouchentouf, directeur exécutif de l’Institut d’entrepreneuriat Banque Nationale – HEC Montréal

Comme son offre est unique, Martin Lessard ne se sent pas vraiment en concurrence avec les autres. « On est complémentaires, souligne-t-il. On collabore notamment avec Centech, la Maison Notman et La Piscine depuis le début. On fait de la co-incubation. »

Le directeur du Centech, Richard Chénier, opine. « Il faut trouver sa niche. On l’a trouvée, nous, et on performe très bien. » Les chiffres lui donnent raison. Le Centech, qui encadre près de 50 % des jeunes pousses québécoises, fait partie des 20 meilleurs incubateurs universitaires du monde. M. Chénier déplore toutefois que l’effet de mode entraîne la création d’incubateurs sans réelle réflexion derrière. « Il faut une analyse et plein de projets, sinon les chances que des entreprises naissent au bout du compte sont minces », dit-il.

Des pépinières d’entreprises

Le maillage entre universités et grandes entreprises ne date pas d’hier, mais la tendance prend de l’ampleur. « Le modèle change. Les entreprises ne mobilisent plus les universités seulement pour leur savoir-faire. Elles recherchent leur expertise sur tous les plans, du déploiement d’une technologie à sa commercialisation », remarque Manaf Bouchentouf.

« On parle aujourd’hui d’excubation, ajoute Louis-Félix Binette. De grandes entreprises qui avaient traditionnellement un budget de recherche et développement énorme constatent que l’univers entrepreneurial est un bassin fertile d’innovation. Les universités, elles, se sont dotées de structures d’accélération. Ça crée des ponts intéressants entre les deux. »