L'intelligence artificielle, ce n'est pas que pour Google, Apple et Amazon... L'industrie aérospatiale s'intéresse depuis de nombreuses années à cette technologie. Et des entreprises d'ici visent à franchir de nouvelles frontières dans ce domaine. Encore faudra-t-il qu'elles disposent de la main-d'oeuvre spécialisée qu'on s'arrache dans le monde entier...

PAS UNE NOUVEAUTÉ

« Chez CAE, on fait de l'intelligence artificielle depuis 15 ans », lance Marc St-Hilaire, vice-président, Rechnologie et innovation, de la firme spécialisée dans les simulateurs de vol. L'entreprise conçoit des logiciels capables d'imiter les situations de vol que les pilotes en formation peuvent trouver dans la réalité. « Ces environnements synthétiques sont comparables à ceux de jeux vidéo, disposant de leurs propres comportements avec lesquels vous interagissez », explique M. St-Hilaire, qui voit depuis cinq ans l'intelligence artificielle gagner de nouvelles industries. « Le tournant a été le bond amorcé par Amazon en 2008-2009 », constate-t-il.

ALLER PLUS LOIN

CAE compte désormais étendre l'intelligence artificielle à de nouvelles applications. « Nous faisons présentement des recherches pour cartographier les processus d'apprentissage », précise Marc St-Hilaire. L'entreprise souhaite aller plus loin que les évaluations telles qu'elles sont réalisées. « Nous pouvons améliorer l'analyse humaine en utilisant l'intelligence artificielle, affirme M. St-Hilaire. C'est notre prochain pas en avant. Cela permettra d'objectiver le processus d'apprentissage et d'identifier les candidats qui ont besoin d'aide. » Cette avancée annoncée est une nécessité pour CAE. « Nous avons une pression constante pour augmenter la sécurité aérienne, explique le dirigeant. Avec une hausse constante du trafic aérien, nous devons augmenter le niveau de sécurité. »

L'AÉROSPATIALE À LA POINTE

L'industrie aérospatiale est un des secteurs à la pointe de la recherche en intelligence artificielle. « L'aérospatiale ira plus vite dans l'implémentation de l'intelligence artificielle », prédit Valérie Bécaert, directrice, partenariats et mobilisation des connaissances, de l'Institut de valorisation des données (IVADO), qui regroupe quatre centres de recherche spécialisés dans des disciplines informatiques et mathématiques connexes à l'Université de Montréal. « Ce n'est pas que cette industrie soit un plus gros demandeur que d'autres... Mais l'aérospatiale a les capacités de travailler avec les universités, parce qu'elle le fait déjà dans plein de domaines ! » Les entreprises aérospatiales disposent donc déjà des structures internes (organisation, cadre juridique...) pour travailler avec les chercheurs.

L'ENJEU DE LA MAIN-D'OEUVRE

Si le Québec dispose de centres de recherche en intelligence artificielle, la question de la main-d'oeuvre disponible suscite des inquiétudes. « Certains de nos projets sont limités par les talents, affirme M. St-Hilaire. Il faut aller chercher ces talents, qui ne sont pas abondants. » Mais aujourd'hui, tout le monde s'arrache les spécialistes du domaine. C'est que d'autres secteurs d'activité, comme les banques, lorgnent cette main-d'oeuvre rare.

Pour alimenter le bassin québécois, l'IVADO recrutera 25 nouveaux professeurs au cours des sept prochaines années. « Nous voulons attirer les meilleurs étudiants du monde entier, assure Valérie Bécaert. Et nous les ferons rester à Montréal, avec les défis intéressants qu'ils trouveront auprès des entreprises. »

Photo Martin Chamberland, La Presse

Marc St-Hilaire est vice-président, technologie et innovation, chez CAE