La tendance est claire : les entreprises québécoises délaissent progressivement les États-Unis pour se tourner vers d'autres marchés internationaux. Cette semaine, nous faisons le point sur le virage dans lequel le Québec s'est engagé dans le secteur porcin.

Il existe au moins une industrie au Québec où les États-Unis, la Russie et le Japon se partagent le titre de «principal marché d'exportation»: celle de la production porcine.

En 2012, Américains, Russes et Japonais ont respectivement acheté 26,1%, 23,9% et 22,9% de la production québécoise de porc destinée aux exportations. À eux trois, leurs achats atteignent plus de 1 milliard de dollars en revenus pour les producteurs québécois.

Le portrait était pourtant bien différent il y a 10 ans. À l'époque, le Québec avait fait du Japon son deuxième marché d'exportation pour le porc. Les États-Unis se trouvaient seuls en tête, accueillant plus de la moitié des exportations québécoises pour ce produit. «Les États-Unis ont déjà représenté presque 70% des exportations», raconte Jean Larose, directeur général de la Fédération des producteurs de porcs du Québec (FPPQ).

Selon lui, deux raisons sont venues changer la donne dans le secteur porcin. Outre le souci de l'industrie canadienne du porc de diversifier ses marchés d'exportation, c'est l'explosion de la production américaine qui a surtout transformé le secteur.

«Il y a 20 ou 25 ans, les États-Unis n'étaient pas autosuffisants en matière de production porcine, explique Jean Larose. Mais graduellement, ils ont augmenté leur production, et sont même devenus les premiers exportateurs du monde.»

Virage

Ce changement de contexte a amené les producteurs québécois à se tourner vers des pays comme la Russie, la Chine et la Corée du Sud. Des marchés d'autant plus intéressants qu'ils leur permettent d'écouler des pièces peu prisées des Québécois comme les abats, les pattes, les oreilles et les museaux, explique Michel Morisset, professeur d'agroéconomie à l'Université Laval.

«Pour rentabiliser l'exploitation, il fallait trouver des marchés pour ces pièces-là, dit-il. C'est pour ça qu'on exporte maintenant vers la Chine ou la Corée des pièces qui, pour nous, ont peu ou pas de valeur.»

C'est aussi vrai pour la Russie. Son cas est même plutôt saisissant lorsqu'on s'attarde aux chiffres. En l'espace de 10 ans, les exportations québécoises de porc en direction de ce pays ont fait un bond de plus de 1200%, dépassant les 343 millions de dollars en 2012.

Selon Michel Morisset, l'industrie russe du porc a baissé de façon importante avec la fin du communisme, ce qui a créé une possibilité pour l'entrée de productions étrangères. Une occasion saisie tout récemment par les producteurs québécois.

Mais le marché russe demeure fragile. En décembre dernier, la Russie a fermé ses frontières au porc québécois en raison de l'utilisation de ractopamine, produit utilisé pour stimuler la production de viande maigre, dans certaines productions.

Après un recul des exportations vers la Russie de plus de 20% au premier trimestre de 2013, la situation serait en voie d'être corrigée, assure Jean Larose. «On s'est conformés assez rapidement au nouveau protocole», dit-il.

Principaux marchés d'exportation du porc québécois

1,4 milliard

Les exportations québécoises de porc en 2012. Le secteur est ainsi parmi les plus importants du Québec en matière d'exportation, et dépasse même celui du papier journal.

71%

C'est la production totale de porc qui est sortie du Québec en 2012, selon la FPPQ. Une production représentant 9% du commerce mondial du porc.

10 ans

Les marchés d'exportation de ce produit ont considérablement changé depuis 10 ans. La Russie et la Chine gagnent en importance d'année en année.

1er RANG

ÉTATS-UNIS

> 375 705,7*

> 59,0% (2002)

> 26,1% (2012)

2e RANG

RUSSIE

> 343 984,9*

> 3,1% (2002)

> 23,9% (2012)

3e RANG

JAPON

> 329 802,2*

> 23,2% (2002)

> 22,9% (2012)

4e RANG

CHINE

> 111 065,1*

> 0,4% (2002)

> 7,7% (2012)

5e RANG

AUSTRALIE

> 61 778,49*

> 4,5% (2002)

> 4,3% (2012)

6e RANG

CORÉE DU SUD

> 48 273,44*

> 2,1% (2002)

> 3,4% (2012)

C'est en Chine et en Europe qu'il se mange le plus de porc sur la planète. Les deux territoires sont aussi les deux plus grands producteurs de cette viande.