Près de six PME sur dix ratent des occasions d'affaires parce que leurs employés manquent de formation, selon la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Nos entreprises souffrent d'une grave pénurie de travailleurs qualifiés. Cette série de six publications propose des stratégies pour améliorer la situation.

Vu de l'extérieur, tout va pour le mieux chez A.&D. Prévost. Spécialisée dans l'aluminium d'architecture, la PME de Richelieu connaît une croissance continue. Les finances de l'entreprise sont à ce point saines qu'il y a deux ans, Capital régional coopératif Desjardins (CRCD) y a investi 30 millions afin de faciliter la mise en place d'une relève interne, dont Bernard Harvey, vice-président finance, fait partie.

Malgré le succès indéniable de l'entreprise, M. Harvey a aidé à mettre en place un programme de mise à niveau permettant à près de 40 employés d'obtenir d'ici juin leur attestation d'études secondaires.

«Plusieurs signes nous ont amenés à intervenir: des employés qui nous posent des questions parce qu'ils n'ont pas bien compris la lettre qui accompagnait leur paye, des formulaires mal remplis, etc. J'avais aussi remarqué que certains employés ne signaient jamais la carte de voeux de leurs collègues qui partaient à la retraite», explique Bernard Harvey.

Avec le concours de la commission scolaire locale, on a offert une formation de 140 heures aux personnes intéressées. Une première cohorte en 2011-2012 a donné des résultats étonnants: 18 des 20 participants ont obtenu leur diplôme. Une deuxième cohorte de 18 employés est en cours.

Mathématique, français, anglais, géographie; tout y passe. La formation de 46 blocs dure trois heures et les employés sont payés. Emploi-Québec, par le truchement de la Commission des partenaires du marché du travail, offre jusqu'à 20$ de l'heure pour chaque employé qui suit le programme.

David Levasseur, ouvrier à l'anodisation, est on ne peut plus fier d'avoir obtenu, à 39 ans, son attestation d'études secondaires. «Je partais de loin. J'ai arrêté en troisième secondaire pour aller sur le marché du travail. Trois heures de cours après une journée de travail, ce n'est pas évident, surtout les soirs d'hiver. Mais je recommencerais sans hésitation», dit-il.

Aujourd'hui, M. Levasseur se sent interpellé lorsque ses enfants complètent leurs devoirs à la maison. Rédiger des rapports et des notes de service dans ses tâches chez A.&D. Prévost ou à titre de délégué en santé et sécurité au travail est soudainement devenu plus simple, voire plus agréable.

Trois pratiques gagnantes selon Bernard Harvey, de A. & D. Prévost

1. Faites appel à des ressources externes dans les cas de mise à niveau des compétences. Le projet sera alors perçu positivement et donnera de la crédibilité aux intervenants et aux formateurs.

2. Assurez-vous que la direction offre un soutien inconditionnel aux programmes de formation. Les horaires doivent être respectés. La formation doit être une priorité, et non une activité qui peut être sans cesse remise.

3. Respectez le caractère confidentiel des motivations individuelles afin que les employés se sentent à l'aise de s'inscrire aux formations. Bref, soyez discret.

LA FORMATION EN CHIFFRES

116 millions: Somme envoyé par Ottawa vers le Québec en vertu de l'entente sur le marché du travail (EMT). L'argent sert à former des chômeurs qui ne touchent pas d'assurance-emploi ou des travailleurs sous-qualifiés.

69 millions: Somme que le gouvernement fédéral, par le biais d'une réforme du Parti conservateur, prévoit retrancher des 116 millions versés au Québec dans le cadre de l'EMT.

116 000: Nombre de personnes qui ont eu recours en 2012 aux programmes de formation et de préparation à l'emploi, financés à 84% par des fonds de l'EMT versés au gouvernement québécois.

Sources: Emploi-Québec et La Presse Canadienne